L'Église
et le don de la vocation
35. Toute
vocation chrétienne trouve son fondement dans l'élection gratuite et prévenante
de la part du Père «qui nous a bénis par toutes sortes de bénédictions
spirituelles, aux cieux, dans le Christ. C'est ainsi qu'Il nous a élus en Lui,
dès avant la création du monde, pour être saints et immaculés sous son regard,
dans l'amour, déterminant d'avance que nous serions pour Lui des fils adoptifs
par Jésus Christ. Tel fut le bon plaisir de sa volonté» (Ep 1, 3-5).
Toute vocation
chrétienne vient de Dieu, est don de Dieu; mais elle n'est jamais donnée en
dehors ou indépendamment de l'Église. Elle passe toujours dans l'Église et par
l'Église, parce que, comme le rappelle le Concile Vatican II, «il a plu à Dieu
que les hommes ne reçoivent pas la sanctification et le salut séparément hors
de tout lien mutuel; il a voulu au contraire en faire un peuple qui le
reconnaîtrait selon la vérité et le servirait dans la sainteté»(98).
Non seulement
l'Église accueille en elle toutes les vocations que Dieu lui donne sur son
chemin de salut, mais elle prend elle-même les traits d'un mystère de vocation,
lumineux et vivant reflet du mystère de la sainte Trinité. En réalité,
l'Église, «peuple réuni par l'unité du Père, du Fils et de l'Esprit Saint»(99),
porte en elle le mystère du Père qui, sans être appelé ou envoyé par personne
(cf. Rm 11, 33-35), appelle tout le monde à sanctifier son nom et à accomplir
sa volonté; l'Église garde en elle-même le mystère du Fils, qui est appelé et
envoyé par le Père pour annoncer à tous le Royaume de Dieu, en les appelant
tous à le suivre. L'Église enfin est dépositaire du mystère de l'Esprit Saint
qui consacre pour la mission ceux et celles que le Père appelle par son Fils
Jésus Christ.
L'Église qui,
par nature, est «vocation», est génératrice et éducatrice de vocations. Elle
l'est dans son être de «sacrement» en tant que «signe» et «instrument», dans
lequel retentit et s'accomplit la vocation de tout chrétien; elle l'est dans
son action, c'est-à-dire dans l'exercice de son ministère d'annonce de la
Parole, de célébration des sacrements, de service et de témoignage de la
charité.
On peut dès
lors saisir à quel point la vocation chrétienne a, par avance, une dimension
ecclésiale. Non seulement la vocation dérive «de» l'Église et de sa médiation;
non seulement elle se fait reconnaître et s'accomplit «dans» l'Église; mais -
dans le service fondamental qu'elle rend à Dieu - elle se présente aussi et
nécessairement comme rendant service «à» l'Église. La vocation chrétienne, dans
toutes ses formes, est un don destiné à l'édification de l'Église, à la
croissance du Règne de Dieu dans le monde(100).
Ce que nous
disons de toute vocation chrétienne trouve une réalisation particulière dans la
vocation sacerdotale. Cette vocation est un appel, par le sacrement de l'Ordre
reçu dans l'Église, à se mettre au service du peuple de Dieu avec une
appartenance spéciale et une configuration à Jésus Christ, comportant
l'autorité d'agir «au nom et dans la personne » de celui qui est la Tête et le
Pasteur de l'Église.
Dans cette
perspective, on comprend ce qu'écrivent les Pères synodaux: «La vocation de
chaque prêtre existe dans l'Église et pour l'Église: c'est par elle que
s'accomplit cette vocation. Il s'ensuit que tout prêtre reçoit la vocation du
Seigneur, par l'intermédiaire de l'Église, comme un don gracieux, une grâce
gratis data (charisme). Il appartient à l'évêque ou au supérieur compétent non
seulement de soumettre à examen l'aptitude et la vocation du candidat, mais
aussi de la reconnaître. Une telle intervention de l'Église fait partie de la
vocation au ministère presbytéral comme tel. Le candidat au presbytérat doit
recevoir la vocation sans imposer ses propres conditions personnelles, mais en
acceptant aussi les normes et les conditions posées par l'Église elle-même,
selon sa propre responsabilité»(101).
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