48. Le sommet de la prière
chrétienne, c'est l'Eucharistie, qui se présente à son tour comme «sommet et
source» des sacrements et de la liturgie des heures. L'éducation liturgique, au
sens plénier d'une insertion vitale dans le mystère de Jésus Christ, mort et
ressuscité, présent et opérant dans les sacrements de l'Église, est absolument
nécessaire pour la formation spirituelle de tout chrétien et en particulier de
tout prêtre. La communion avec Dieu, axe de la vie spirituelle entière, est un
don et un fruit des sacrements. En même temps, elle est un devoir et une
responsabilité que les sacrements confèrent à la liberté du croyant, pour que
cette communion inspire les décisions, les choix, les attitudes et les actions de
la vie quotidienne. En ce sens, la «grâce» qui rend «nouvelle» la vie
chrétienne est la grâce de Jésus Christ, mort et ressuscité, qui continue à
répandre dans les sacrements son Esprit, saint et sanctificateur. De même, la
«loi nouvelle» qui doit guider et régler l'existence du chrétien est inscrite
par les sacrements dans le «coeur nouveau». C'est la loi de charité envers Dieu
et envers les frères, comme réponse et prolongement de la charité de Dieu
envers l'homme qui est signifiée et communiquée par les sacrements. On peut
ainsi comprendre la valeur d'une participation «pleine, consciente et
active»(145) aux célébrations sacramentelles, pour accueillir et mettre en
pratique le don de la «charité pastorale» qui constitue l'âme du ministère
sacerdotal.
Cela vaut
surtout pour la participation à l'Eucharistie, mémorial du sacrifice et de la
mort du Christ et de sa glorieuse résurrection, «sacrement de piété, signe
d'unité, lien de charité»(146), banquet pascal «où le Christ est reçu en
nourriture, l'âme est remplie de sa grâce, et la gloire à venir nous est déjà
donnée»(147). Or les prêtres, en qualité de ministres des choses sacrées, sont
surtout les ministres du Sacrifice de la Messe(148): leur rôle est absolument
indispensable, parce que, sans prêtre, il ne peut y avoir d'offrande
eucharistique.
Cela montre
l'importance essentielle de l'Eucharistie pour la vie et le ministère du
prêtre, et donc dans la formation spirituelle des candidats au sacerdoce. Avec
une grande simplicité et pour être très concret, je redis: «Il conviendra que
les séminaristes participent chaque jour à la célébration eucharistique, de
façon qu'ensuite ils prennent comme règle de leur vie sacerdotale cette
célébration quotidienne. On leur apprendra en outre à considérer la célébration
eucharistique comme le moment essentiel de leur journée. Ils y participeront
activement, sans jamais se contenter d'y assister par pure habitude. Enfin, les
candidats au sacerdoce seront formés aux dispositions intimes que l'Eucharistie
fait naître: la reconnaissance pour les bienfaits reçus d'en haut, puisque que
l'Eucharistie est une action de grâce; l'attitude d'offrande, qui les pousse à
unir l'offrande d'eux-mêmes à l'offrande eucharistique du Christ; la charité,
nourrie par un sacrement qui est signe d'unité et de partage; le désir de
contemplation et d'adoration devant le Christ réellement présent sous les
espèces eucharistiques»(149).
Il est plus que
jamais urgent de faire redécouvrir, à l'intérieur de la formation spirituelle,
la beauté et la joie du sacrement de pénitence. Notre culture, en effet, avec
le renouveau des formes les plus subtiles d'autojustification, risque de faire
perdre le «sens du péché» et, en conséquence, la joie consolante de la demande
de pardon (cf. Ps 51/50, 14) et de la rencontre avec Dieu «riche en
miséricorde» (Ep 2, 4). Aussi est-il nécessaire d'éduquer les futurs prêtres à
la vertu de pénitence que l'Église a la sagesse d'inspirer dans ses
célébrations et dans les temps forts de l'année liturgique, et qui trouve sa
plénitude dans le sacrement de la Réconciliation. De là découlent le sens de
l'ascèse et de la discipline intérieure, l'esprit de sacrifice et de
renoncement, l'acceptation de la peine et de la croix. Ces éléments de la vie
spirituelle présentent souvent de grandes difficultés pour beaucoup de
candidats au sacerdoce qui ont grandi dans des conditions relativement aisées:
ils sont moins portés et moins sensibilisés à ces éléments par les exemples et
les idéaux véhiculés par les moyens de communication sociale, même dans les
pays où les conditions de vie sont plus précaires et où la situation des jeunes
est plus austère. Pour cette raison, mais surtout pour réaliser, à l'exemple du
Christ Bon Pasteur, le «don radical de soi» requis du prêtre, les Pères
synodaux ont écrit: «Il est nécessaire d'inculquer le sens de la croix, qui est
au coeur du mystère pascal. Grâce à cette identification au Christ crucifié, au
Christ serviteur, le monde peut retrouver la valeur de l'austérité, de la
douleur et même du martyre, au sein de la culture actuelle, imprégnée de
sécularisme, d'avidité et d'hédonisme»(150).
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