La rémunération du
travail
Normes
de justice et d'équité
Notre
âme est saisie de profonde amertume devant le spectacle infiniment triste
: une foule de travailleurs, en de nombreux pays et sur des continents entiers,
reçoivent un salaire qui les oblige, eux et leurs familles, à des
conditions de vie sous-humaines, Cela est dû sans doute aussi à ce
que dans ces pays et continents le processus d'industrialisation en est encore
à ses débuts, ou en période insuffisamment avancée,
Pourtant,
en certains de ces pays, criant et outrageant est le contraste entre
l'extrême misère des multitudes et l'abondance, le luxe
effréné de quelques privilégiés. En d'autres pays,
la génération actuelle est contrainte à subir des
privations inhumaines, en vue d'accroître l'efficacité de
l'économie nationale suivant un rythme d'accélération
disproportionné avec les exigences de la justice et de l'humanité.
En d'autres, une part considérable du revenu est employée
à mettre en valeur ou entretenir un prestige national mal compris, des
sommes immenses sont dépensées en armements.
De plus,
dans les pays économiquement développés, il n'est pas rare
que des rétributions élevées, très
élevées, soient accordées à des prestations peu
absorbantes ou de valeur discutable, tandis que des catégories
entières de citoyens honnêtes et travailleurs ne reçoivent
pour leur activité assidue et féconde que des
rémunérations trop infimes, insuffisantes ou, en tout état
de cause, disproportionnées à leur apport au bien commun, au
rendement de l'entreprise comme au revenu global de l'économie
nationale.
Aussi
bien, Nous estimons être de Notre devoir d'affirmer une fois de plus que
la rétribution du travail ne peut être ni entièrement
abandonnée aux lois du marché ni fixée arbitrairement :
elle est déterminée en justice et équité. Cela
exige que soit accordée aux travailleurs une rémunération
qui leur permette, avec un niveau de vie vraiment humain, de faire face avec
dignité à leurs responsabilités familiales. Cela demande
en outre que, pour déterminer les rétributions, on
considère leur apport effectif à la production, les situations
économiques des entreprises, les exigences du bien commun de la nation.
On prendra en spéciale considération les répercussions sur
l'emploi global du travail dans l'ensemble du pays, et aussi les exigences du
bien commun universel, intéressant les communautés internationales,
diverses en nature et en étendue.
Il est
clair que les principes exprimés ci-dessus valent partout et toujours.
On ne saurait toutefois déterminer la mesure dans laquelle ils doivent
être appliqués sans tenir compte des richesses disponibles ;
celles-ci peuvent varier, varient en effet en quantité et qualité
de pays à pays, et, dans le même pays, d'une période
à l'autre.
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