Mais
pour que tous ces résultats soient obtenus conformément à Nos espérances, vous
savez, vénérables Frères, combien est nécessaire la coopération prudente et
attentive de ceux que Notre-Seigneur a envoyés operarios in messem suam,
c'est-à-dire des clercs. Aussi, vous le comprenez, votre principal souci doit
être, à l'égard de ceux qui sont déjà revêtus du sacerdoce, de développer en
eux la sainteté conforme à leur état, et quant aux élèves du sanctuaire, vous
devez les préparer soigneusement par une excellente formation à un aussi saint
ministère. Bien que votre zèle n'ait pas besoin d'être stimulé à
l'accomplissement de ce devoir, Nous vous y exhortons et vous en supplions, car
il n'y a rien de plus important pour le bien de l'Eglise: comme Nos
prédécesseurs d'heureuse mémoire, Léon XIII et Pie X, en ont traité tout
exprès, Nous n'en parlerons pas davantage; seulement Nous désirons que, grâce à
votre vigilance et à vos instantes recommandations, les instructions de ces
très sages Pontifes, surtout l'Exhortatio ad clerum de Pie X, ne tombent
jamais dans l'oubli, mais soient très scrupuleusement observées.
Il est un point
cependant, que Nous ne saurions passer sous silence: aux prêtres du monde
entier, que Nous chérissons tous comme Nos fils, Nous voulons rappeler combien
il est nécessaire, tant pour leur propre salut que pour l'efficacité de leur
ministère, qu'ils soient très étroitement unis et pleinement soumis à leurs
Evêques respectifs. Il n'est que trop vrai, comme Nous l'avons insinué plus
haut, en le déplorant, les ministres du sanctuaire ne sont pas tous exempts de
cet esprit d'indépendance et d'insubordination qui est le propre des temps
actuels. II n'est pas rare que les
Pasteurs des Eglises se voient contristés et combattus par ceux dont ils
seraient en droit d'attendre de l'aide et du réconfort. Si quelqu'un s'est
écarté à ce point de son devoir, il doit considérer sérieusement, qu'elle est
divine, l'autorité de ceux quos Spiritus Sanctus posuit episcopos regere
Ecclesiam Dei, (32) et si, comme Nous l'avons fait voir, c'est
résister à Dieu que de résister à n'importe quelle autorité légitime, c'est une
impiété bien plus grande de refuser l'obéissance aux Evêques, que Dieu a
consacrés et marqués du sceau de sa puissance. Cum caritas, dit saint
Ignace martyr, non sinat me tacere de vobis, propterea anteverti vos
admonere, ut unanimi sitis in sententia Dei. Etenim Iesus Christus,
inseparabilis nostra vita, sententia Patris est, ut et Episcopi, per tractus
terrae constituti, in sententia Patris sunt. Unde decet vos in Episcopi
sententiam concurrere. (33) Or
ce que dit cet illustre Martyr, tous les Pères et les Docteurs de l'Eglise
l'ont dit également. Ajoutez à cela, que bien lourd est déjà le fardeau qui
pèse sur les épaules des Evêques en ces temps difficiles; encore plus pénibles
sont leurs soucis, touchant le troupeau qui leur est confié: ipsi enim
pervigilant, quasi rationem pro animabus vestris reddituri, (34) Ne
doit-on pas taxer de cruauté ceux qui par leur insubordination augmentent
encore ce fardeau et ces angoisses ? Hoc enim non expedit vobis,
(35) leur dirait l'Apôtre, et cela parce que Ecclesia est plebs
sacerdoti adunata, et pastori suo gregs adhaerens; (36) d'où il
suit que c'est n'être pas avec l'Eglise, que de n'être pas avec son Evêque.
Et maintenant, vénérables Frères, en
terminant ces Lettres, Notre esprit se reporte spontanément vers ce que Nous
écrivions au début; et, de nouveau, Nous appelons de tous nos vœux, en faveur
de la société humaine et en faveur de l'Eglise, la fin de cette guerre si
désastreuse; en faveur de la société humaine, afin qu'une fois la paix
rétablie, elle progresse vraiment dans toute culture civile et humaine; en
faveur l'Eglise de Jésus-Christ, pour que, libre enfin de toute entrave, elle
aille sur tous les rivages et en toutes les parties du monde apporter aux
hommes le secours et le salut. Hélas ! depuis trop longtemps déjà l'Eglise ne
jouit plus de la pleine liberté qui lui est nécessaire; Nous voulons dire,
depuis le jour où son Chef le Pontife Romain s'est vu privé de la force et de
la garantie, que par un dessein de la divine Providence il avait obtenu, au
cours des siècle, pour sauvegarder cette même liberté. Une fois cette force et
cette garantie enlevées, il en est résulté, comme c'était inévitable, une
grande inquiétude parmi les catholiques: tous ceux en effet qui, de près ou de
loin, se proclament les fils du Pontife Romain, ont pleinement le droit
d'exiger que, sans aucun doute possible, leur Père commun soit réellement, et
même apparaisse manifestement, affranchi de tout pouvoir humain dans
l'administration de sa charge apostolique. C'est pourquoi, tout en souhaitant
instamment que les nations fassent la paix au plus tôt, Nous désirons vivement
aussi, que le Chef de l'Eglise cesse de se trouver dans cette condition
anormale, qui pour bien des raisons est funeste aussi à la tranquillité des
peuples. C'est pourquoi aux protestations que sur ce point Nos Prédécesseurs ont
fait entendre à plusieurs reprises, poussés qu'ils étaient non par des raisons
humaines mais par un devoir sacré, c'est-à-dire, par l'obligation de défendre
les droits et la dignité du Siège Apostolique, Nous entendons ajouter ici les
Nôtres, pour les mêmes motifs.
Puisque c'est dans les mains de Dieu que
sont les volontés des Princes et de tous ceux qui peuvent mettre fin aux
horreurs et aux désastres que nous avons rappelés, il Nous reste, vénérables
Frères, à élever vers Dieu Notre voix suppliante et à Nous écrier au nom de
tout le genre humain : " Donnez, Seigneur, la paix à notre temps ".
Que celui qui a dit : Ego Dominus... faciens pacem, (37) daigne
Lui-même, apaisé par Nos prières, calmer au plus tôt ces flots tumultueux qui
bouleversent la société civile et la société religieuse. Que la bienheureuse Vierge Nous
soit propice, Elle qui a engendré le " Prince de
la Paix ", et qu'Elle prenne sous sa protection maternelle Notre humble
personne, Notre ministère pontifical, la sainte Eglise et les âmes de tous les
hommes, rachetées par le sang précieux de son divin Fils.
Comme gage des
faveurs célestes et en témoignage de Notre bienveillance, Nous accordons très
affectueusement la bénédiction apostolique à Vous, vénérables Frères, à votre
clergé et à votre peuple.
Donné à
Rome, près saint-Pierre, en la fête de Tous les Saints, ce 1er Novembre 1914,
de Notre Pontificat la première année.
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