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Ioannes Paulus PP. II
Laborem exercens

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  • III. LE CONFLIT ENTRE LE TRAVAIL ET LE CAPITAL DANS LA PHASE ACTUELLE DE L'HISTOIRE
    • 12. Priorité du travail
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12. Priorité du travail

En face de cette réalité contemporaine, dont la structure porte si profondément inscrits tant de conflits causés par l'homme et dans laquelle les moyens techniques, fruits du travail humain, jouent un rôle de premier plan (on pense également ici à la perspective d'un cataclysme mondial dans l'éventualité d'une guerre nucléaire dont les possibilités de destruction seraient quasi inimaginables), on doit avant tout rappeler un principe toujours enseigné par l'Eglise. C'est le principe de la priorité du «travail» par rapport au «capital». Ce principe concerne directement le processus même de la production dont le travail est toujours une cause efficiente première, tandis que le «capital», comme ensemble des moyens de production, demeure seulement un instrument ou la cause instrumentale. Ce principe est une vérité évidente qui ressort de toute l'expérience historique de l'homme.

Lorsque, dans le premier chapitre de la Bible, nous lisons que l'homme doit soumettre la terre, nous savons que ces paroles se réfèrent à toutes les ressources que le monde visible renferme en lui-même et qui sont mises à la disposition de l'homme. Toutefois ces ressources ne peuvent servir à l'homme que par le travail. Au travail demeure également lié depuis les origines le problème de la propriété, car, pour faire servir à soi et aux autres les ressources cachées dans la nature, l'homme a comme unique moyen son travail. Et afin de pouvoir faire fructifier ces ressources par son travail, l'homme s'approprie des petites parties des diverses richesses de la nature: du sous-sol, de la mer, de la terre, de l'espace. L'homme s'approprie tout cela en en faisant le chantier de son travail. Il se l'approprie par le travail et pour avoir encore du travail.

Le même principe s'applique aux phases successives de ce processus, dans lequel la première phase demeure toujours le rapport de l'homme avec les ressources et les richesses de la nature. Tout l'effort de connaissance qui tend à découvrir ces richesses, à déterminer leurs diverses possibilités d'utilisation par l'homme et pour l'homme, nous fait prendre conscience de ceci: tout ce qui, dans l'ensemble de l'oeuvre de production économique, provient de l'homme, aussi bien le travail que l'ensemble des moyens de production et la technique qui leur est liée (c'est-à-dire la capacité de mettre en oeuvre ces moyens dans le travail), suppose ces richesses et ces ressources du monde visible que l'homme trouve, mais qu'il ne crée pas. Il les trouve, en un certain sens, déjà prêtes, préparées pour leur découverte et leur utilisation correcte dans le processus de production. En toute phase du développement de son travail, l'homme rencontre le fait que tout lui est principalement donné par la «nature», autrement dit, en définitive, par le Créateur. Au début du travail humain, il y a le mystère de la création. Cette affirmation, déjà indiquée comme point de départ, constitue le fil conducteur de ce document et sera développée ultérieurement, dans la dernière partie de ces réflexions.

La considération qui vient ensuite sur le même problème doit nous confirmer dans la conviction de la priorité du travail humain par rapport à ce que, avec le temps, on a pris l'habitude d'appeler «capital». Si en effet, dans le cadre de ce dernier concept, on fait entrer, outre les ressources de la nature mises à la disposition de l'homme, l'ensemble des moyens par lesquels l'homme se les approprie en les transformant à la mesure de ses besoins (et ainsi, en un sens, en les «humanisant»), on doit alors constater dès maintenant que cet ensemble de moyens est le fruit du patrimoine historique du travail humain. Tous les moyens de production, des plus primitifs aux plus modernes, c'est l'homme qui les a progressivement élaborés: l'expérience et l'intelligence de l'homme. De cette façon sont apparus, non seulement les instruments les plus simples qui servent à la culture de la terre, mais aussi _ grâce au progrès adéquat de la science et de la technique _ les plus modernes et les plus complexes: les machines, les usines, les laboratoires et les ordinateurs. Ainsi, tout ce qui sert au travail, tout ce qui constitue, dans l'état actuel de la technique, son «instrument» toujours plus perfectionné, est le fruit du travail.

Cet instrument gigantesque et puissant, à savoir l'ensemble des moyens de production considérés en un certain sens comme synonyme de «capital», est du travail et porte les marques du travail humain. Au stade présent de l'avancement de la technique, l'homme, qui est le sujet du travail, quand il veut se servir de cet ensemble d'instruments modernes, c'est-à-dire des moyens de production, doit commencer par assimiler, au plan de la connaissance, le fruit du travail des hommes qui ont découvert ces instruments, qui les ont programmés, construits et perfectionnés, et qui continuent à le faire. La capacité de travail _ c'est-à-dire la possibilité de participer efficacement au processus moderne de production _ exige une préparation toujours plus grande et, avant tout, une instruction adéquate. Evidemment, il reste clair que tout homme, participant au processus de production, même dans le cas où il exécute seulement un type de travail qui ne requiert pas une instruction particulière et des qualifications spéciales, continue à être, dans ce processus de production, le vrai sujet efficace, tandis que l'ensemble des instruments, fût-il le plus parfait, est seulement et exclusivement un instrument subordonné au travail de l'homme.

Cette vérité, qui appartient au patrimoine stable de la doctrine de l'Eglise, doit être toujours soulignée en rapport avec le problème du système de travail et aussi de tout le système socio-économique. Il faut souligner et mettre en relief le primat de l'homme dans le processus de production, le primat de l'homme par rapport aux choses. Tout ce qui est contenu dans le concept de «capital», au sens restreint du terme, est seulement un ensemble de choses. Comme sujet du travail, et quel que soit le travail qu'il accomplit, l'homme, et lui seul, est une personne. Cette vérité contient en elle-même des conséquences importantes et décisives.




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