Ritournelle
ORONTE
L'orage est
nolent, il a dû vous surprendre,
Mais sans vous allarmer Iaissez gronder les flots,
Je viens vous offrir dans Argos
Un bras armé pour vous detffendre.
MÉDÉE
Si par l'exil
que m'impose le Roy,
Corinthe s'affranchit des fureurs de la guerre.
Pourquoy charper une autre terre
Des maux que Je traîne avec moy ?
Acaste veut que je perisse,
Et lorsque pour ma perte il arme son courroux.
Je croirois faire une injustice
De l'étendre sur vous.
ORONTE
Le fier appareil
de ses armes
Me cause de foibles allarmes.
Pour les attirer contre moy,
Dans la vive ardeur qui me presse
Que Jason obtienne du Roy;
Que par l'hymen de la Princesse,
Demain il couronne ma foy.
Alors dans mes Estats Jason pourra vous suivre,
Et si vos ennemis veulent vous désunir,
Ils verront en cessant de vivre
Se Je sçay comme il faut punir.
MÉDÉE
Vous ignorez ce
qui se passe,
Il faut vous découvrir par quelle trahison
On veut m'éloigner de Jason.
Il faut vous faree voir jusqu'où va ma disgrace;
Tremblez, Prince, mes maux enfin trop confirmez
En m'accablant retombent sur vous même,
Jason me trehit, Jason ayme.
Et peut estre ést aymé de ce que aymez.
ORONTE
Ciel! que me
dites vous, je perdrois la Princesse,
Au mépris de mes vœux elle aymeroit Jason.
MÉDÉE
N'en doutez pas
ma presence les blase,
Je fus obstacle à leur tendresse;
C'est là de mon exit la pressante ruson.
ORONTE
En vain je
voudrois me le taire.
On vous bannit mon hymen se differe,
J'ouvre les yeux sur mon malheur;
Tout me le dit, j'en voy la certitude,
Qui l'auroit crû que tant d'ingratitude
D'eût payer le beau feu qui regne dans mon coeur.
MÉDÉE
Souffrez vous
qu'on vous enleve
Ce cher objet de vos desirs.
ORONTE
Si cette trahson
vous couste des soupirs,
Souffrirez-vous qu'elle s`acheve.
MÉDÉE
Quel plus sensible
coup pouvoisje le«vou?
TOUS DEUX
Non, dans un
cœur, Quand l'Amour est extrême,
Rien n'approche du desespoire
D'estre trahy par ce qu'on ayme.
Unissons nos ressentimonts
Contre ces perfides amans,
Que Jason à mes feux prefere la Princesse, voeux ravisse Son crime ne peut
s'épler.
MÉDÉE
Il vient, mon
coeur s'émeut et reprend sa tendresse,
Elle en triomphera, laissez moy luy parler.
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