C.
MARIAGES MIXTES
143.
Cette section du Directoire œcuménique ne cherche pas à
traiter de façon exhaustive toutes les questions pastorales et
canoniques liées soit à la célébration même
du sacrement du mariage chrétien, soit à l'action pastorale
à exercer auprès des familles chrétiennes, puisque ces
questions font partie de l'action pastorale générale de tout
Evêque ou de la Conférence régionale des Evêques. Ce
qui suit met l'accent sur les questions spécifiques concernant les
mariages mixtes, et doit être compris en ce contexte. Le terme de «
mariage mixte » se réfère à tout mariage entre une partie
catholique et tout autre partie chrétienne baptisée
n'étant pas en pleine communion avec l'Eglise catholique.(139)
144.
En tout mariage, la préoccupation première de l'Eglise est de
maintenir la solidité et la stabilité du lien conjugal
indissoluble et de la vie familiale qui en découle. L'union parfaite des
personnes et le partage complet de la vie qui constituent l'état de
mariage, sont plus aisément assurés quand les deux conjoints
appartiennent à la même communauté de foi. De plus,
l'expérience pratique et les observations résultant de dialogues
divers entre les représentants d'Eglises et de Communautés
ecclésiales montrent que les mariages mixtes présentent souvent,
pour les couples eux-mêmes et pour leurs enfants, des difficultés
pour le maintien de leur foi et de leur engagement chrétien et pour
l'harmonie de la vie familiale. Pour toutes ces raisons, le mariage entre des
personnes de la même Communauté ecclésiale demeure
l'objectif à recommander et à encourager.
145.
Constatant cependant le nombre croissant des mariages mixtes en bien des
parties du monde, la vive sollicitude pastorale de l'Eglise s'étend aux
couples qui se préparent à contracter de tels mariages et aux
couples qui les ont déjà contractés. Ces mariages,
même s'ils ont leurs difficultés propres, « présentent de
nombreux éléments qu'il est bon de valoriser et de développer,
soit pour leur valeur intrinsèque, soit pour la contribution qu'ils
peuvent apporter au mouvement œcuménique. Cela se vérifie en
particulier lorsque les deux époux sont fidèles à leur
engagement religieux. Le baptême commun et le dynamisme de la grâce
fournissent aux époux, dans ces mariages, le fondement et la motivation
qui les portent à exprimer leur unité dans la sphère des
valeurs morales et spirituelles ».(140)
146.
Il est de la responsabilité permanente de tous, mais spécialement
des prêtres, des diacres et de ceux qui les assistent dans le
ministère pastoral, de fournir un enseignement et un soutien
particuliers au conjoint catholique dans sa vie de foi et aux couples des
mariages mixtes pour leur préparation au mariage, lors de sa célébration
sacramentelle, et pour leur vie commune qui en découle. Ce soin pastoral
doit tenir compte de la condition spirituelle concrète de chaque
conjoint, de son éducation à la foi et de sa pratique de la foi.
Il faudrait, en même temps, respecter la situation spéciale de
chaque couple, la conscience de chaque conjoint et la sainteté du
mariage sacramentel lui-même. Si cela est jugé utile, les
Evêques diocésains, les Synodes des Eglises orientales catholiques
ou les Conférences épiscopales pourraient établir des
directives plus précises pour ce service pastoral.
147.
Pour s'acquitter de cette responsabilité, lorsque la situation le
demande, il faudrait faire, si possible, une démarche positive pour
créer des liens avec le ministre de l'autre Eglise ou Communauté
ecclésiale, même si cela ne s'avère pas toujours facile. De
façon générale, les rencontres mutuelles de pasteurs
chrétiens, visant à soutenir ces mariages et à en
maintenir les valeurs, peuvent être un excellent terrain de collaboration
œcuménique.
148.
En établissant les programmes de la nécessaire préparation
au mariage, le prêtre ou le diacre, et ceux qui l'assistent, devraient
insister sur les aspects positifs de ce que le couple, en tant que
chrétien, partage de la vie de grâce, de foi, d'espérance
et d'amour et d'autres dons intérieurs du Saint-Esprit.(141)
Chaque conjoint, tout en continuant à être fidèle à
son engagement chrétien et à le mettre en pratique, devrait
rechercher ce qui peut mener à l'unité et à l'harmonie,
sans minimiser les réelles différences, et en évitant une
attitude d'indifférence religieuse.
149.
Pour favoriser une compréhension et une unité plus grandes,
chaque conjoint devrait apprendre à mieux connaître les convictions
religieuses de l'autre et les enseignements et les pratiques religieuses de
l'Eglise ou Communauté ecclésiale à laquelle cet autre
appartient. Pour aider les deux conjoints à vivre de l'héritage
chrétien qui leur est commun, il doit leur être rappelé que
la prière en commun est essentielle pour leur harmonie spirituelle, et
que la lecture et l'étude des Saintes Ecritures sont de grande
importance. Pendant la période de préparation, l'effort du couple
pour comprendre les traditions religieuses et ecclésiales de chacun, et
l'examen sérieux des différences qui existent, peut mener
à une honnêteté, à une charité et à
une compréhension plus grandes envers ces réalités mais
aussi envers le mariage lui-même.
150.
Lorsque, pour une cause juste et raisonnable, la permission de contracter un
mariage mixte est demandée, les deux parties devront être
instruites des fins et des propriétés essentielles du mariage qui
ne doivent être exclues par aucune des deux parties. De plus, il sera
demandé à la partie catholique, selon la forme établie par
le droit particulier des Eglises orientales catholiques ou par la
Conférence épiscopale, de déclarer qu'elle est prête
à écarter les dangers d'abandon de la foi et de promettre
sincèrement de faire son possible pour que tous les enfants soient
baptisés et éduqués dans l'Eglise catholique. L'autre
partenaire doit être informé de ces promesses et
responsabilités.(142) En même temps, il faut constater que
la partie non-catholique peut éprouver une obligation semblable en
raison de son propre engagement chrétien. Il est à noter que,
dans le Droit canonique, il n'est requis de ce partenaire aucune promesse
écrite ou orale.
Dans
les contacts que l'on aura avec ceux qui veulent célébrer un
mariage mixte, on suggérera et on favorisera la discussion, et si
possible la décision avant le mariage, de la question du baptême
et de l'éducation catholique des enfants qu'ils auront.
L'Ordinaire
du lieu, pour évaluer l'existence ou non d'« une cause juste et
raisonnable » en vue d'accorder la permission de ce mariage mixte, tiendra
compte entre autres d'un refus explicite de la partie non catholique.
151.
Dans l'accomplissement de son devoir de transmettre la foi catholique à
ses enfants, le parent catholique respectera la liberté religieuse et la
conscience de l'autre parent, et aura soin de l'unité et de la
permanence du mariage et du maintien de la communion de la famille. Si,
malgré tous les efforts, les enfants ne sont pas baptisés ni
élevés dans l'Eglise catholique, le parent catholique ne tombe
pas sous la censure du droit canonique.(143) Toutefois, l'obligation
qu'il a de partager avec ses enfants la foi catholique ne cesse pas. Cette
exigence demeure et peut comporter, par exemple, qu'il joue une partie active
dans la contribution à l'atmosphère chrétienne du foyer;
qu'il fasse tout son possible par la parole et par l'exemple pour aider les
autres membres de la famille à apprécier les valeurs
spécifiques de la tradition catholique; qu'il prenne toutes les
dispositions nécessaires pour que, bien informé de sa propre foi,
il puisse être capable de l'exposer et d'en discuter avec les autres;
qu'il prie avec sa famille pour demander la grâce de l'unité des
chrétiens, telle que le Seigneur la veut.
152.
Tout en gardant clairement à l'esprit qu'il existe des
différences doctrinales qui empêchent la pleine communion
sacramentelle et canonique entre l'Eglise catholique et les diverses
Églises orientales, dans la pastorale des mariages entre catholiques et
chrétiens orientaux, il faut accorder une attention particulière
à l'enseignement correct et solide de la foi qui est partagée par
les deux conjoints et au fait que l'on trouve dans les Eglises orientales « de
vrais sacrements, surtout, en vertu de la succession apostolique, le sacerdoce
et l'Eucharistie, qui les unissent intimement à nous ».(144) Une
véritable attention pastorale accordée aux personnes
engagées dans ces mariages peut les aider à mieux comprendre
comment leurs enfants seront initiés aux mystères sacramentels du
Christ et en seront spirituellement nourris. Leur formation à la
doctrine chrétienne authentique et à la façon de vivre en
chrétien doit être, en sa majeure partie, semblable en chacune des
Eglises. Les diversités en matière de vie liturgique et de
dévotion privée peuvent servir à encourager la
prière familiale, au lieu de la gêner.
153.
Le mariage entre une partie catholique et un membre d'une Eglise orientale est
valide s'il a été célébré selon un rite
religieux par un ministre ordonné, pourvu que les autres règles
du droit requises pour la validité aient été
observées. Dans ce cas, la forme canonique de la
célébration est requise pour la
licéité.(145) La forme canonique est requise pour la
validité des mariages entre catholiques et chrétiens d'autres
Eglises et Communautés ecclésiales.(146)
154.
Pour de graves raisons, l'Ordinaire du lieu de la partie catholique, restant
sauf le droit des Eglises orientales,(147) après avoir
consulté l'Ordinaire du lieu où le mariage sera
célébré, peut dispenser la partie catholique de
l'observance de la forme canonique du mariage.(148) Parmi les raisons
de la dispense, peuvent être prises en considération le maintien
de l'harmonie familiale, l'obtention de l'accord des parents pour le mariage,
la reconnaissance de l'engagement religieux particulier de la partie
non-catholique ou de son lien de parenté avec un ministre d'une autre
Eglise ou Communauté ecclésiale. Les Conférences
épiscopales devraient établir des normes pour qu'une telle dispense
puisse être accordée en suivant une pratique commune.
155.
L'obligation, imposée par certaines Eglises ou Communautés
ecclésiales, d'observer leur propre forme de mariage n'est pas une cause
de dispense automatique de la forme canonique catholique. Les situations
particulières de ce genre doivent être l'objet du dialogue entre
les Eglises, au moins au niveau local.
156.
On gardera présent à l'esprit qu'une certaine forme publique de
célébration est requise pour la validité,(149) si
le mariage est célébré avec dispense de la forme
canonique. Pour souligner l'unité du mariage, il n'est pas permis
qu'aient lieu deux célébrations religieuses
séparées où l'échange de consentement serait
exprimé deux fois ou bien un service où seraient
célébrés conjointement ou successivement de tels
échanges.(150)
157.
Avec l'autorisation préalable de l'Ordinaire du lieu, un prêtre
catholique ou un diacre, s'il y est invité, peut être
présent ou participer de quelque manière à la
célébration des mariages mixtes, lorsque la dispense de la forme
canonique a été accordée. En ce cas, il ne peut y avoir
qu'une seule cérémonie dans laquelle la personne qui
préside reçoit l'échange des consentements des époux.
Sur invitation de ce célébrant, le prêtre catholique ou le
diacre peut réciter des prières supplémentaires et
appropriées, lire les Ecritures, faire une brève exhortation et
bénir le couple.
158.
Si le couple le demande, l'Ordinaire du lieu peut permettre que le prêtre
catholique invite le ministre de l'Eglise ou de la Communauté
ecclésiale de la partie non catholique à participer à la
célébration du mariage, y lire les Ecritures, faire une
brève exhortation et bénir le couple.
159.
Parce que des problèmes concernant le partage eucharistique peuvent se
poser en raison de la présence de témoins ou d'invités
non-catholiques, un mariage mixte, célébré selon la forme
catholique, a généralement lieu en dehors de la liturgie
eucharistique. Cependant, pour une juste raison, l'Evêque du
diocèse peut permettre la célébration de
l'Eucharistie.(151) Dans ce dernier cas, la décision d'admettre
ou non la partie non-catholique du mariage à la communion eucharistique,
est à prendre en accord avec les normes générales existant
en la matière, tant pour les chrétiens orientaux (152)
que pour les autres chrétiens,(153) et en tenant compte de cette
situation particulière de la réception du sacrement de mariage
chrétien par deux chrétiens baptisés.
160.
Bien que les époux d'un mariage mixte aient en commun les sacrements du
baptême et du mariage, le partage eucharistique ne peut être
qu'exceptionnel et l'on doit, en chaque cas, observer les normes
rapportées ci-dessus concernant l'admission d'un chrétien non
catholique à la communion eucharistique,(154) de même que
celles concernant la participation d'un catholique à la communion
eucharistique dans une autre Eglise.(155)
|