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Quintus Septimius Florens Tertullianus
De la pudicité

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XXI. -- POUVOIRS SPÉCIAUX AUX APÔTRES

[1] Les apôtres comprenaient mieux que nous ces ligures et ils en avaient naturellement plus de souci. Mais, pour en venir maintenant à cet autre point, je veux faire une distinction entre la doctrine des apôtres et leur pouvoir. La discipline gouverne l'homme; le pouvoir le marque d'un caractère spécial. Mais encore, qu'est-ce que le pouvoir ? c'est l'Esprit, et l'Esprit c'est Dieu. [2] Qu'enseignait donc l'Esprit ? qu'il ne fallait avoir aucun rapport avec les œuvres de ténèbres. Observe ce qu'il ordonne. Et qui pouvait pardonner les fautes ? Cela n'appartient qu'à lui. « Qui en effet remet les fautes, sinon Dieu seul? » Il s'agit, bien entendu, des fautes mortelles commises contre lui et contre son temple. [3] Car, en ce qui touche les péchés commis contre toi, il t'ordonne, dans la personne de Pierre, de les pardonner septante fois sept fois. C'est pourquoi, s'il était établi que les bienheureux apôtres aient eux-mêmes usé d'indulgence à l'égard des fautes dont le pardon dépend, non de l'homme, mais de Dieu, c'est qu'ils l'auraient fait, non pas en vertu de la discipline, mais en vertu de leur pouvoir personnel. [4] Ils ont ressuscité les morts, ce que Dieu seul a fait ; ils ont guéri les malades, ce que personne n'a fait, sauf le Christ; bien plus, ils ont infligé des châtiments, ce que le Christ n'a pas voulu faire : car il ne convenait pas qu'il fît souffrir, lui qui venait pour souffrir. Ananias et Elimas furent frappés, Ananias de mort, Elimas de cécité, pour qu'il fût prouvé par là même que le Christ aurait pu en faire autant.

[5] De même les prophètes avaient pardonné à des pénitents l'homicide et aussi J'adultère, parce qu'ils manifestèrent également les preuves de leur sévérité. Mais toi, l'homme apostolique, exhibe-moi maintenant tes titres prophétiques, etje reconnaîtrai ton autorité divine. Revendique pour toi le pouvoir de remettre les péchés de cette nature. [6] Mais si ton rôle n'est que de veiller au maintien de la discipline ; si ta prépondérance est celle d'un simple ministre, non celle du pouvoir absolu, qui es-tu donc, et d'où le prends-tu, pour oser pardonner? toi, qui ne montrant ni prophète ni apôtre, es dépourvu de l'excellence à qui le pardon est réservé. [7] « Mais l'Église, dis-tu, a le pouvoir de remettre les péchés. » Je le reconnais et je le veux plus volontiers encore que toi, moi qui ai dans les prophètes nouveaux le Paraclet lui-même qui dit : « L'Église a le pouvoir de remettre les péchés ; mais je ne le ferai pas, de peur qu'ils ne commettent d'autres fautes encore. » —[8] Mais si c'est l'esprit de fausse prophétie qui a fait cette déclaration ?— Un destructeur de la foi se fût accrédité bien plutôt par sa clémence et en incitant les autres au péché. Si son zèle lui a conseillé cette précaution, conformément à l'esprit de vérité, c'est donc que l'esprit de vérité peut accorder aux fornicateurs leur pardon, mais ne veut pas le faire au risque d'en pervertir un plus grand nombre.

[9] Et maintenant, puisque telle est ton opinion, je te demande à quel titre tu t'arroges ce droit de l'Église. Si c'est parce que le Seigneur a dit à Pierre : « Sur cette pierre, je bâtirai mon Eglise, je t'ai donné les clefs du royaume céleste », ou : « Tout ce que tu auras lié ou délié sur la terre sera lié ou délié dans le ciel », te figures-tu pour cela que le pouvoir de lier ou de délier ait dérivé jusqu'à toi, c'est-à-dire jusqu'à toute l'Église qui se rattache à Pierre ? [10] De quel droit détruis-tu et travestis-tu l'intention manifeste du Sauveur, qui a conféré ce privilège à Pierre et à lui seul : « C'est sur toi, dit-il, que je bâtirai mon Église » et «je te donnerai les clefs » non pas à l'Eglise, et « tout ce que tu auras délié ou lié », non tout ce qu'ils auront délié ou lié. [11] Les faits, du reste, sont là. C'est sur Pierre, c'est-à-dire par lui, que l'Eglise a été construite. C'est lui-même qui inaugure la clef, et tu vois quelle clef : « Israélites, retenez bien ce que je dis : Jésus de Nazareth, cet homme que Dieu vous a envoyé », etc. [12] C'est lui-même, enfin, qui, le premier, ouvrit par le baptême du Christ l'entrée du royaume céleste, où sont déliées les fautes précédemment liées et où sont liées celles qui n'avaient pas été déliées, conformément au véritable salut ; c'est lui qui enchaîne Ananias clans les liens de la mort et qui guérit de son infirmité le paralytique. [13] Ainsi encore, dans la discussion sur le point de savoir s'il fallait ou non conserver la Loi, Pierre, le premier de tous, sous l'inspiration de l'Esprit, commença à parler de la vocation des Gentils : « Et maintenant, pourquoi tentez-vous Dieu, en mettant sur le cou de vos frères un joug que ni nos pères ni nous n'avons pu porter ? Mais c'est par la grâce de Jésus que nous croyons être sauvés tout comme ceux-là. » [14] Cette déclaration abolit les prescriptions abrogées de la Loi et rendit obligatoires celles qui furent conservées. Tant il est vrai que le pouvoir de lier et de délier n'a point du tout été remis entre les mains de Pierre en ce qui concerne les fautes capitales des fidèles. [15] Si le Seigneur lui avait prescrit de pardonner jusqu'à septante fois sept fois les fautes que son frère commettrait contre lui, il lui aurait ordonné, en tous cas, de ne rien lier, c'est-à-dire de ne rien retenir dans la suite, si ce n'est peut-être les fautes commises, non contre unfrère, mais contre le Seigneur ; car, de ce fait que les péchés commis contre un homme sont pardonnes, on peut tirer présomption que les péchés commis contre Dieu ne doivent pas l'être.

[16] Qu'y a-t-il là qui regarde l'Eglise, j'entends la tienne, Psychique ? Car après Pierre, cette puissance appartiendra aux spirituels, à l'apôtre ou au prophète, vu que l'Eglise est proprement et essentiellement l'Esprit lui-même, dans lequel est la Trinité d'une divinité unique, le Père, le Fils et l'Esprit Saint. C'est lui qui forme le lien de l'Eglise, qui, d'après le Seigneur, consiste en trois personnes. [17] Et ensuite tous ceux qui partagent cette même foi sont considérés comme Eglise par le Fondateur et le Consécrateur. C'est pourquoi l'Église remettra bien les péchés ; mais l'Eglise-Esprit, par l'intermédiaire d'un homme animé de l'Esprit, et non l'Eglise, collection d'évêques. Car c'est le droit souverain du Seigneur, non celui de son serviteur; c'est le droit de Dieu même, non celui du prêtre.




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