L'attitude de l'Eglise en
face de l'athéisme.
21 § 1.
L'Eglise, fidèle à la fois à Dieu et à l'homme, ne peut cesser de réprouver
avec douleur et avec la plus grande fermeté, comme elle l'a fait dans le passé
16, ces doctrines et ces manières de faire funestes qui contredisent la
raison et l'expérience commune et font déchoir l'homme de sa noblesse native.
§ 2. Elle s'efforce cependant de
saisir dans l'esprit des athées les causes cachées de la négation de Dieu et,
bien consciente de la gravité des problèmes que l'athéisme soulève, poussée par
son amour pour tous les hommes, elle estime qu'il lui faut soumettre ces motifs
à un examen sérieux et approfondi.
§ 3. L'Eglise tient que la
reconnaissance de Dieu ne s'oppose en aucune façon à la dignité de l'homme,
puisque cette dignité trouve en Dieu Lui-même ce qui la fonde et ce qui
l'achève. Car l'homme a été établi en société, intelligent et libre, par
Dieu son Créateur. Mais surtout, comme fils, il est appelé à l'intimité même de
Dieu et au partage de son propre bonheur. L'Eglise enseigne, en outre, que
l'espérance eschatologique ne diminue pas l'importance des tâches terrestres,
mais en soutient bien plutôt l'accomplissement par de nouveaux motifs. A l'opposé, lorsque manquent le support
divin et l'espérance de la vie éternelle, la dignité de l'homme subit une très
grave blessure, comme on le voit souvent aujourd'hui, et l'énigme de la vie et
de la mort, de la faute et de la souffrance reste sans solution : ainsi, trop
souvent, les hommes s'abîment dans le désespoir.
§ 4. Pendant ce
temps, tout homme demeure à ses propres yeux une question insoluble qu'il
perçoit confusément. A certaines heures, en effet, principalement à l'occasion
des grands événements de la vie, personne ne peut totalement éviter ce genre
d'interrogation. Dieu seul peut pleinement y répondre et d'une manière
irrécusable, Lui qui nous invite à une réflexion plus profonde et à une
recherche plus humble.
§ 5. Quant au remède à
l'athéisme, on doit l'attendre d'une part d'une présentation adéquate de la
doctrine, d'autre part de la pureté de vie de l'Eglise et de ses membres. C'est
à l'Eglise qu'il revient en effet de rendre présents et comme visibles Dieu le
Père et son Fils Incarné, en se renouvelant et en se purifiant sans cesse
17, sous la conduite de l'Esprit-Saint. Il y faut surtout le témoignage
d'une foi vivante et adulte, c'est-à-dire d'une foi formée à reconnaître
lucidement les difficultés et capable de les surmonter. D'une telle foi, de
très nombreux martyrs ont rendu et continuent de rendre un éclatant témoignage.
Sa fécondité doit se manifester
en pénétrant toute la vie des croyants, y compris leur vie profane, et en les
entraînant à la justice et à l'amour, surtout au bénéfice des déshérités. Enfin
ce qui contribue le plus à révéler la présence de Dieu, c'est l'amour fraternel
des fidèles qui travaillent d'un coeur unanime pour la foi de l'Evangile
18 et qui se présentent comme un signe d'unité.
§ 6. L'Eglise, tout
en rejetant absolument l'athéisme, proclame toutefois, sans arrière-pensée, que
tous les hommes, croyants et incroyants, doivent s'appliquer à la juste
construction de ce monde, dans lequel ils vivent ensemble : ce qui, assurément,
n'est possible que par un dialogue loyal et prudent. LEglise déplore donc les
différences de traitement que certaines autorités civiles établissent
injustement entre croyants et incroyants, au mépris des droits fondamentaux de
la personne. Pour les croyants, elle
réclame la liberté effective et la possibilité d'élever aussi dans ce monde le
temple de Dieu. Quant aux athées, elle les invite avec humanité à
examiner en toute objectivité l'Evangile du Christ.
§ 7. Car l'Eglise
sait parfaitement que son message est en accord avec le fond secret du coeur
humain quand elle défend la dignité de la vocation de l'homme, et rend ainsi
l'espoir à ceux qui n'osent plus croire à la grandeur de leur destin. Ce
message, loin de diminuer l'homme, sert à son progrès en répandant lumière, vie
et liberté et, en dehors de lui, rien ne peut combler le coeur humain . « Tu
nous as faits pour Toi », Seigneur, « et notre coeur ne connaît aucun répit
jusqu'à ce qu'il trouve son repos en Toi » 19.
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