SCÈNE
IV
ERASTE.
Reçois, traître, avec joie
Les faveurs que par nous ta maîtresse t'envoie.
PRIDAMANT.
On l'assassine, ô dieux ! Daignez le secourir.
ERASTE.
Puissent les suborneurs ainsi toujours périr !
ISABELLE.
Qu'avez-vous fait, bourreaux ?
ERASTE.
Un juste et grand exemple,
Qu'il faut qu'avec effroi tout l'avenir contemple,
Pour apprendre aux ingrats, aux dépens de son sang,
A n'attaquer jamais l'honneur d'un si haut rang.
Notre main a vengé le prince Florilame,
La princesse outragée, et vous-même, madame,
Immolant à tous trois un déloyal époux,
Qui ne méritait pas la gloire d'être à vous.
D'un si lâche attentat souffrez le prompt supplice,
Et ne vous plaignez point quand on vous rend justice.
Adieu.
ISABELLE.
Vous ne l'avez massacré qu'à demi :
Il vit encore en moi ; soûlez son ennemi ;
Achevez, assassins, de m'arracher la vie.
Cher époux, en mes bras on te l'a donc ravie !
Et de mon coeur jaloux les secrets mouvements
N'ont pu rompre ce coup par leurs pressentiments !
O clarté trop fidèle, hélas ! et trop tardive,
Qui ne fait voir le mal qu'au moment qu'il arrive !
Fallait-il... mais j'étouffe, et, dans un tel malheur,
Mes forces et ma voix cèdent à ma douleur ;
Son vif excès me tue ensemble et me console,
Et puisqu'il nous rejoint...
LYSE.
Elle perd la parole.
Madame... Elle se meurt ; épargnons les discours,
Et courons au logis appeler du secours.
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