II
Les Images de Confréries
Toute l’ancienne société française reposait sur le système des corporations,
brutalement supprimé par la Révolution et remplacé forcément aujourd’hui par
les groupements syndicaux de patrons et d’artisans. De là aussi, la création
sous diverses formes, de confréries diverses : confréries des «patrons»
protecteurs de la corporation, comme celles qu’a relevées Ouin-Lacroix, dans
son Histoire des anciennes corporations d’art et métiers ; confréries
spéciales de dévotion à un saint ; confréries de pélerinage, de gens s’étant
rendus ensemble aux « lieux saints », ou à quelque sanctuaire vénéré, comme le
Mont-Saint-Michel ou Saint-Jacques-de-Compostelle.
Enfin, surtout en Normandie, étaient fort nombreuses, les confréries de
charité, si curieuses par leurs traditions, leurs costumes, leurs usages
pittoresques et qui existent encore, surtout dans le département de l’Eure.
Créés au XIe siècle, fondés à l’occasion des épidémies de peste, alors qu’on
laissait les morts sans sépulture, les Frères de Charité eurent pour but
de les ensevelir convenablement en suivant tout un cérémonial symbolique. Comme
jadis, les Marqueurs de la Peste, à Rouen, ils avaient dans leurs
fonctions, un costume spécial, consistant en un chapeau spécial ou chaperon,
dont le nom est resté à l’ornement en forme de baudrier qu’ils portent en
sautoir et où est souvent brodée l’image du Saint Patron. Ce vêtement,
primitivement, ressemblait au coqueluchon, ou capuce, destiné à se
préserver de l’air contaminé par la peste. De même que les lépreux
avertissaient le public de leur présence par le bruit des sonnettes, de même
les Frères de Charité avaient leurs Cliqueteurs pour annoncer
leur passage, en agitant leurs clochettes ou tintenelles, fonctions
parfois remplies par les Charitons, les plus jeunes frères reçus. Les Frères
de Charité portaient aussi leurs chandeliers, leurs instruments, leurs
masses sur l’épaule.
Les confréries de charité, en dehors de leur rôle de sociétés de secours
mutuels, donnaient un très grand luxe aux processions, notamment à celle de la
Fête-Dieu ou de la Pentecôte. Il faut, pour s’en rendre compte, se rendre à
l’église de la Couture, de Bernay, le lundi de la Pentecôte. Dès les premières
lueurs du jour les confréries, de cinq à six lieues à la ronde, accompagnées de
leur clergé paroissial, défilaient majestueusement par toutes les routes et par
tous les chemins, pour se rendre à l’église où après s’être fait dire des évangiles,
les confrères restaient debout, tenant des cierges ornementés de rubans, sur de
longues hampes. Le spectacle était inoubliable. Sortis de l’église, les frères
remisaient leurs ornements et la barrette sur l’oreille, passaient du
sanctuaire au cabaret, pour apaiser un peu leur faim… et leur soif, aiguisés
par l’air du matin.
Les « Confréries du Saint-Sacrement », étaient différentes des Charités. Elles
étaient spécialement chargées d’escorter le viatique quand on le porte aux
malades ; leur origine datait du XVIe siècle. Il y en avait notamment à
Lisieux, à Caen, à Sainte-Croix-de-Bernay, au Petit-Andely et surtout à
Broglie, où les quatorze confrères portaient la soutane de drap blanc, avec
ceinture et chaperon également blancs. La Confrérie de la Passion, à
Saint-Patrice, fut aussi célèbre pour avoir fait représenter un mystère, qui
fut publié de nos jours par M. P. Le Verdier. Telles étaient les principales
confréries normandes, et de leur formation, toutes les images religieuses, que
nous allons passer en revue, tiraient leur origine. D’où provenaient, en effet,
ces images très particulières et très diverses ?
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De ce que lorsqu’un nouveau membre se faisait inscrire sur le registre de la
Confrérie, il devait recevoir une sorte de diplôme, de brevet, comme on
disait parfois à l’époque, prouvant son incorporation, par une mention
spéciale. C’était l’image de la confrérie. Dans les circonstances solennelles,
le « maître en charge » de la Confrérie allait déposer, de maison en maison,
ces images pieuses qu’on appelait des « frairies » où se trouvaient imprimées,
les noms des saints protecteurs de la Confrérie, son origine et son histoire,
les convocations à la fête.
Ces images, assez simples, un peu frustes, étaient généralement composées, dit
le Dr Helot, d’un sujet central, toujours le même pour chaque Confrérie,
représentant les saints en l’honneur desquels on avait créé la Confrérie.
Autour, comme une bordure, se trouvaient des petits sujets religieux sans grand
intérêt, des vignettes formant un encadrement au sujet central, tiré sur
bois ou sur cuivre. D’une année à l’autre, ces petits sujets pouvaient varier.
Enfin, au bas de cette feuille volante, il y avait la place pour les
inscriptions et pour ce qu’on appelait l’acrostiche. L’acrostiche
n’était autre qu’une pièce en vers, formée par les premières lettres du prénom
et du nom du maître en charge, nouvellement élu. M. le Dr Helot, dans ses
intéressantes Notes sur l’imagerie populaire en Normandie, parues en
1908, dit « qu’il connaît une Confrérie des environs de Rouen, qui tous les
ans, fait encore tirer un certain nombre d’images par un imprimeur de Rouen,
mais ce dernier est obligé de faire l’acrostiche du maître en charge ».
Les images de Confrérie ne sont pas toujours des chefs-d’oeuvre. Elles sont
souvent d’un dessin lourd et naïf, mais elles ne sont pas à dédaigner. Elles
aident à connaître, comme le faisait remarquer M. Charles de Beaurepaire, la
date de l’établissement et le titre des Confréries, qui tiennent une place
importante dans l’évolution de l’idée religieuse. Plusieurs de ces Confréries
sont même spéciales aux communautés d’art. Les images de Confrérie fournissent
aussi des renseignements très utiles sur les accessoires, sur les symboles
des saints, ce que Cahier et Martin ont appelé les Caractéristiques des
Saints, si utiles aux verriers et aux graveurs pour la représentation des
scènes religieuses. Très souvent, ces images religieuses représentaient, enfin,
les différents genres de contretables, qui, pendant plus de deux siècles, ont
fait l’ornement des principaux sanctuaires. C’était, pour les dessinateurs et
les graveurs du XVIIIe siècle, un thème tout trouvé.
La plupart du temps, les planches ou le cuivre, servant à imprimer les images
de Confrérie, appartenait à la Corporation qui, tous les ans, en faisaient
tirer des exemplaires par l’imprimeur. Quelques Confréries ne faisaient pas ces
frais chaque année. On laissait en blanc, comme sur l’image du
Manoir-sur-Seine, la date et le nom du maître en charge, qu’on
inscrivait ensuite à la main. Ces images, dites frairies, étaient fort
nombreuses. En 1573, à Roncherolles-sur-le-Vivier, on payait à l’imprimeur de
livres, 3 sous pour leur impression. A Saint-Léger-du-Bourdeny, en 1725, les
confrères payaient encore à M. Le Prevost, pour 800 frairies à 1 livre
10 sous, le cent 12 livres. Le tirage qui s’en était fait à 400, en 1740,
s’éleva jusqu’à 900 en 1744, pour retomber à 500 en 1781. Ces images, qu’on
distribuait par tournées, étaient souvent collées aux portes, tandis que
d’autres images étaient placées dans les maisons. Un de nos collectionneurs
rouennais a même acquis une fort jolie armoire rouennaise, parce qu’à
l’intérieur avait été collée une image de confrérie. Les colleurs semblent
avoir été payés une quinzaine de sous par tournée. Pendant longtemps, ces
distributions d’images furent faites par les chapelains des Confréries. Cela
donna lieu vraisemblablement à des abus, puisqu’on voit, à plusieurs reprises,
le Chapitre défendre aux chapelains de la cathédrale de se charger de cette
commission qui paraissait peu digne de leur caractère. Les registres
capitulaires, à la date de juillet 1632, rappellent que Me Simon Duchesne,
chapelain de la Confrérie de Sainte-Anne, fut blâmé par le Chapitre, pour
s’être absenté du choeur de la cathédrale, pour aller porter des frairies par
les rues de Rouen, contre et au préjudice des ordonnances.
Les images de Confrérie, comme on le voit, tirées à un nombre énorme
d’exemplaires, distribuées à profusion sont pourtant assez rares. On pourrait
s’en étonner, dit M. Charles de Beaurepaire, mais en y réfléchissant on conçoit
que le nombre infini de ces images populaires, a dû être une des causes de leur
disparition parce qu’en général on n’attache de prix aux objets qu’en raison de
leur rareté. Il faut encore remarquer ces gravures étaient d’un grand format et
conséquemment difficiles à conserver ; et, de plus, affichées aux portes des
confrères, ce qui les exposait à une détérioration et même à une destruction
presque certaine.
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Malgré toutes ces difficultés, notre érudit concitoyen M. E. Pelay, avait réuni
un nombre considérable d’images de confrérie et, pendant sa longue carrière,
s’était spécialisé dans la recherche des images religieuses. Malheureusement,
cette admirable collection a été dispersée, lors de sa vente. Cependant, un
certain nombre d’images religieuses rouennaises servant de «chemises» à des
dossiers du fond du Baillage de Rouen, ont été conservées et décrites par M.
Ch. de Beaurepaire, dans les Mélanges historiques et archéologiques
(1897) p. 346. D’autres aussi ont été conservées par certains collectionneurs
rouennais ou normands et méritent une rapide description.
Parmi ces images de confrérie, voici celle de l’Eglise Saint-Amand,
représentant Saint-François, recevant les stigmates, Saint-Amand et
Saint-Louis, confrérie fondée en 1631, exemplaire de 1675 avec acrostiche
en l’honneur de Nicolas- Droman. Viennent ensuite les images de Saint-André,
Porte Cauchoise pour la Confrérie de la Viere, Sainte-Anne,
Sainte-Marguerite, faite en 1601, et refaite en 1669 et en 1782, celle de Saint-Cande-le-Vieux.
Confrérie de Saint-Ursin et de Sainte-Clotide, auquel il faut joindre
Saint-Nicolast, trouvé principalement à Lisieux, dont dépendait l’église
Saint-Cande et qui y possédait une châsse magnifique. Date d’origine de la
Confrérie : 1638. - Eglise Saint-Eloi : Confrérie du Saint-Sacrement,
fondée en 1548, image représentant un ostensoir avec les statues de la Vierge
et Saint-Eloi, dont la planche donnée, en 1768, fut gravée par Neveu. - Eglise
Saint-Etienne-des-Tonneliers : image représentant l’Annonciation, entourée
des instruments de distillation de la corporation des Vinaigriers-Limonadiers,
avec les représentations de Saint-Vincent, Saint-Nicolas et Saint-Etienne.
Gravure en taille-douce, donnée, en 1767, par L. J. Le Vacher. - Eglise
Saint-Maclou : Confrérie de Saint-Clair, fondée en 1615 et Confrérie des
Trois-Nativités, gravure de Pierre Le Sueur, 1704. - Eglise
Sainte-Marie-la-Petite : Confrérie de Saint-Cyr et de Sainte-Julitte.
Gravure en taille-douce, par Jean Housset, en 1664, refaite sur cuivre en 1720.
Eglise Saint-Nicaise : image de confrérie, représentant la
Sainte-Trinité, avec cinq personnages en bas, en costume, dont un enfant malade
sur un lit, soutenu par sa mère pendant qu’un prêtre l’administre. La planche
avait été donnée par Me J. Daudebourg, ouvrier en la monnaie de Rouen. Autre
image de la Confrérie des Pèlerins du Mont Saint-Michel, signées J. D. B. 1605.
- Eglise Saint-Nicolas : Cadre richement orné, image de Sainte-Reine et
de son supplice, gravée sur cuivre, en 1696, par Duvivier l’aîné, dont quelques
exemplaires sur satin. Autre image, par Pierre Le Sueur, 1701.
Eglise Saint-Paul : Image de la Sainte-Vierge, donnant un livre à
Saint-Paul, tandis que l’enfant Jésus remet les clefs à Saint-Pierre. Donnée
par les anciens et le jeune maître de cette charité, en 1710, gravée par P. Le
Sueur. - Eglise Saint-Pierre-l’Honoré. En haut l’entrevue de Sainte-Anne
et de Joachim à la Porte-Dorée ; en bas, Saint-Foy avec un dragon et un diable
à ses pieds. Confrérie pour les Maîtres Peigniers, Cornetiers et Tabletiers de
Rouen. Gravé par P. Costil (1704). Autre image avec Saint-Clair,
Sainte-Catherine et Sainte-Marguerite (15 novembre 1644). On voit par ce
placard que les confrères et leurs soeurs allaient en pèlerinage à
Saint-Clair-sur-Epte, après s’être arrêtés à la Chapelle Sainte-Clotilde, aux
Andelys.- Eglise Saint-Sever : Image de la confrérie de Saint-Severt,
fondée le 7 novembre 1489, et confirmée en 1514. Planche donnée par Jacques
Moisant et Jean Lemonnier, maître en charge (1696). Autre image pour la même
confrérie donnée par F.-G. Jaudin, en 1767, gravée par Gouël. Autre image de la
Confrérie de Sainte-Suzanne, Saint-Mathurin, Sainte-Clotilde, gravée par P. Le
Sueur -1697). - Eglise Saint-Vivien : image avec Saint-Nicolas et les
enfants, Saint-Hubert et le Cerf. Colonnes surmontées de vases de fleurs. Image
de la Confrérie de Saint-Mathurin et de Notre-Dame-de-Pitié, signée T.D.V.
Belley. Image de la Confrérie de Sainte-Trinité, Sainte-Vierge et de saintes.
Gravure sur bois du XVIIIe siècle.
En dehors de ces églises principales, d’autres églises avaient des images de
confrérie : l’église des Carmes, avec une planche sur bois, gravée par
Delamare, en 1725 et une autre en 1731 retouchée par Maintru, en 1752, aux
armoiries des vitriers l’église des Cordeliers, image gravée par
Jacques, en 1758 ; - Le Prieuré de Saint-Lô : Image, et de
Saint-Jean-Porte-Latine des imprimeurs-libraires, par Le Sueur (1668), planche
qui est reproduite par X Boutigny dans l’atelier de notre concitoyen et ami G.
Dervois ; l’église de Bonsecours, et son image de confrérie,
représentant la Vierge, datée de 1609 et signée de Pierre Le Sueur. Signalons
encore les images de la confrérie de Saint-Martin de Canteleu ; de la
Charité de Grand-Quevilly, gravée par J. Guéroult, I.-B., 1609 ; de la
Charité de Saint-Ouen, à Oissel ; de Saint-Roch d’Orival ; de
Saint-Aubin du Petit-Couronne, gravée au XVIe siècle, sans nom de
graveur ; de la Charité de Saint-Adrien et Saint-Sébastien, de Saint-Crespin-du-Becquet,
gravée par Le Sueur, en 1607 ; du Saint-Sacrement à Saint-Etienne-du-Rouvray
(1664).
Il faut encore joindre à ces images de confréries rouennaises ou proches de
Rouen, quelques feuilles volantes intéressantes, signalées par le Dr Helot,
dans ses Notes sur l’Imagerie populaire en Normandie et même reproduites
: celle, par exemple, de la Confrérie de Saint-Vigor, de Pont-de-l’Arche où un
clerc tient un espèce de dragon monstrueux, semblable à la Gargouille, qui
ravageait les environs de Bayeux. Dans l’admirable collection Pelay, une image
de cette confrérie de Saint-Vigor existait sous une autre forme. Elle avait été
imprimée chez Mégard, en 1845. Le président de cette confrérie religieuse
s’appelait le Roi, ce qui le distinguait de celui de la Société de
Saint-Michel de la même église, chargée des inhumations et qui prenait le titre
d’Echevin. Une autre image de Confrérie religieuse est celle de la Charité
Saint-Martin, fondée à Saint-Martin-du-Vivier et qui représente les scènes
célèbres du partage du manteau avec un pauvre rencontré sur le chemin, puis,
enfin, l’image de la Charité de Saint-Geneviève, de Bourg-Baudouin. La Sainte
est représentée gardant les moutons dans la campagne de Nanterre, dans un goût
qui rappelle les vierges italiennes. C’est Papillon qui grava cette jolie
image.
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Dans une très curieuse notice sur quelques graveurs rouennais, Derniers
Mélanges historiques et archéologiques de Rouen 1909 (p. 332), M. Ch. de
Beaurepaire a donné quelques détails sur certains graveurs des images de
confrérie. Il cite Jean Asselin, graveur, rue aux Juifs, qui était protestant,
et figure, en 1698, dans l’Etat des nouveaux convertis ; du Bellay, dont
Papillon, dans son Traité historique de la Gravure sur bois, a dit qu’il
avait été le maître de Pierre Le Sueur et de Jean Papillon ; Jacques Belleau,
en 1698, demeurant rue d’enfer ; Nicolas Bougon, faiseur d’images en papier,
domicilié en 1527-1531 sur la paroisse Saint-Jean ; Delamare, que nous avons
cité comme ayant gravé, en 1725, une planche d’une Confrérie de la
Sainte-Trinité, en l’église des Carmes ; Jean Duval, sur la paroisse
Saint-Croix-des-Pelletiers, qui grava, en 1635-36, des figures pour des
affiches des pardons de la Cathédrale ; Louis Duveau, graveur rue Massacre,
1744 ; Duvivier l’aîné, qui grava, en 1696, l’image de la Confrérie de
Sainte-Reine ; Gouël le jeune, qui habitait, en 1765, dans la rue de la Poterne
; Jean-Pierre Jacques, graveur et marchand d’estampes, locataire d’une boutique
près de la Tour Georges d‘Amboise, chargé par la Ville de faire les coins du
gouverneur duc d’Harcourt en 1765 ; il ne réussit pas et ces coins se
brisèrent. Il en fut de même à la Monnaie, quand il présenta quelques louis. Il
a signé deux cartes d’adresse : A la Clef d’or et A la Boule d’or
; Le Cordier, en 1681 ; J.-B. Le Gris, graveur, 1788 ; Les Le Sueur, qu’on
connaît surtout par Papillon. Pierre Le Sueur, né à Rouen en 1636, mort le 19
décembre 1716, qui fut un admirable graveur sur bois, et qui a signé les images
des confréries d’Amfreville-la-Campagne, 1665, et de diverses confréries que
nous avons citées. Il était entré dans la Confrérie de Saint-Maclou, le 24
avril 1708 ; Pierre Le Sueur, dit l’aîné, son fils, né en 1663 « Il gravoit
ordinairement son nom tout au long sur ses ouvrages, et quelquefois en abrégé,
avec ces trois lettres : P.L.S. Il savoit aussi dessiner assez proprement. Il a
gravé plusieurs pièces excellentes, telles que le grand fleuron du Dictionnaire
de l’Académie française... » J’ai eu depuis, de hasard, une autre estampe de ce
graveur pour des billets mortuaires, qui est un beau morceau. Vincent Le Sueur,
1668-1743, a encore gravé un grand nombre de vignettes et de fleurons. Pierre
Le Sueur grava les estampilles et marques de toiles apportées aux Halles ;
Claude Maintru, d’une famille de graveurs, décédé rue du Petit-Salut, a gravé
la planche sur cuivre de la Confrérie de la Sainte-Trinité des Carmes, en 1731
; Nicolas Meru ; Pierre Mullard ; Les Papillon - Jean Papillon, né à Rouen,
originaire de Touraine, graveur sur bois sans savoir dessiner, mais habile
comme praticien, signait I. P., mourut en 1710. - Papillon, né en 1661, élevé à
Rouen, chez son grand-père, venu à Paris chez Noël Cochin, inventeur des
papiers de tapisserie, qu’il mit en vogue en 1688. « Le sieur Papillon est un
des plus célèbres graveurs sur bois dans les genres les plus précieux et les
plus délicats. Les vignettes, les armoiries, les paysages et les portraits qui
ont été exécutés par cet habile artiste sont regardés à juste titre, comme des
chefs-d’oeuvre de l’art ».
Il faut encore cité J.-B. Patrice Picquenot, élève de Descamps, qui fut surtout
un graveur d’estampes, comme le prouve sa Vue du Prieuré des Deux Amants,
en 1781 ; la famille des Antoine, Jacques, Laurent, Louis, Renault, qui furent
tous graveurs au XVIIe siècle ; Theroulde, Jean Toutain, maître graveur,
demeurant rue de la Poterne, mort le 25 novembre1705 ; Jean et Claude Vallier, imagiers,
en 1618.
On voit, par le nombre des graveurs rouennais, et nous en avons omis, comme P.
Costil, comme G. Amy, qui a signé l’image de la Confrérie de Quincampoix, et Le
Cartel, - parfaitement - qui signe celle de la Confrérie de Saint-Gervais, que
le nombre des images de confréries dut être considérable. Pour le seul
département de l’Eure, E. Veuclin, qui fut un redoutable chercheur, dans ses Documents
concernant les confréries de charité normande (1892), a recueilli des
renseignements sur plus de quatre cents charités normandes. La Basse-Normandie
en comptait aussi un grand nombre.
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Il faut bien dire que, seul à Rouen, M. Edouard Pelay avait réuni une
documentation générale sur les confréries de charité et surtout sur les images
religieuses. Seul, il aurait pu résumer le résultat de ses recherches.
Heureusement que ses nombreux cartons sur l’imagerie religieuse normande, ont
été recueillis par un de nos plus distingués collectionneurs. Cette
documentation si intéressante, pourra rendre possible la publication d’un
ouvrage d’ensemble sur l’imagerie populaire religieuse dans notre pays normand.
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