SCÈNE QUATRIÈME
Isolier, Le gouverneur.
LE GOUVERNEUR
Je ne puis plus longtemps voyager de la sorte.
ISOLIER
Eh bien! reposons-nous sous ces ombrages frais.
LE GOUVERNEUR
Pourquoi m'avoir forcé de quitter notre escorte
Et m'amener ici?
ISOLIER
(à part, regardant à gauche)
J'avais bien mes projets...
Voilà donc le château de ma belle cousine!
Si je pouvais l'entrevoir...
Quel bonheur!
Mais, loin de partager l'ardeur qui me domine,
Elle ferme à l'amour son castel et son coeur.
(Au gouverneur qui s'est assis).
Eh! monsieur le gouverneur,
Reprenez-vous un peu courage?
LE GOUVERNEUR
Maudit emploi! Maudit message!
Monseigneur notre prince, auquel je suis soumis,
M'ordonne de chercher le comte Ory, son fils,
Ce démon incarné, mon élève et mon maître,
Qui, sans mon ordre, de la cour
S'est avisé de disparaître.
ISOLIER
(à part)
Pour jouer quelque nouveau tour.
LE GOUVERNEUR
On le disait caché dans ce séjour.
Comment l'y découvrir?...
Comment le reconnaître?
ISOLIER
Vous devez tout savoir...
D'être son gouverneur
N'avez-vous pas l'honneur?
LE GOUVERNEUR
Oui! quel honneur!
Air
Veiller sans cesse,
Trembler toujours
Pour son altesse
Et pour ses jours...
Du gouverneur
D'un grand seigneur,
Tel est le profit et l'honneur.
Quel honneur d'être gouverneur!
À la guerre comme à la chasse,
Si quelque péril le menace,
Il faut partout suivre ses pas.
Dût-il me mener au trépas!
Veiller sans cesse,
Trembler toujours, etc., etc., etc.
Et s'il est épris d'une belle,
Il me faut courir après elle;
Tout en lui faisant des sermons
Sur le danger des passions.
Veiller sans cesse,
Courir toujours,
Pour son altesse
Ou ses amours:
Du gouverneur,
D'un grand seigneur.
Tel est le profit et l'honneur.
Quel honneur d'être gouverneur!
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