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peine Maternus avait achevé ces mots, avec l'accent de l'enthousiasme et de
l'inspiration, que Vipstanus Messala entra dans sa chambre. A l'attention
peinte sur les visages, il soupçonna qu'on s'entretenait de matières sérieuses.
"Ne serais-je pas dit-il, venu mal à propos interrompre une conférence
secrète, où vous concertez peut-être le plan de quelque défense ? - Non, non,
dit Sécundus ; je voudrais même que vous fussiez venu plus tôt. Vous auriez eu du
plaisir à entendre Aper, dans une allocution parfaitement belle, exhorter
Maternus à tourner uniquement vers la plaidoirie son talent et ses études, et
Maternus défendre son art de prédilection, comme les vers doivent être
défendus, avec un éclat et une hardiesse de langage qui le rapprochaient du
poète plus que l'orateur. - Assurément, dit Messala, j'aurais pris un plaisir
infini à ces discours, et ce qui ne m'en fait pas moins, c'est de voir des
hommes tels que vous, l'élite des citoyens et les orateurs de notre époque, non
contents de déployer leur génie dans les débats judiciaires et les exercices du
cabinet, y joindre encore ces discussions qui nourrissent l'esprit et offrent
un savant et agréable délassement aux témoins comme aux acteurs de ces disputes
érudites. Aussi est-il vrai de dire, Sécundus, que votre Vie de Julius
Asiaticus, en faisant espérer de vous d'autres ouvrages du même genre, ne vous
attire pas moins d'approbation que n'en reçoit Aper pour n'avoir pas renoncé
jusqu'ici aux controverses de l'école, et pour avoir mieux aimé employer ses
loisirs à la manière des rhéteurs modernes qu'à celle des anciens orateurs.
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