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auparavant reporter ma pensée sur le plan d'études que suivaient ces orateurs,
doit les travaux infinis, les méditations journalières, les exercices de tout
genre, sont attestés par leurs propres ouvrages. Rien n'est plus connu de nous
que le livre de Cicéron intitulé Brutus, dans la dernière partie duquel (car
l'histoire des anciens orateurs occupe la première) il raconte ses
commencements, ses progrès et, pour ainsi dire, l'éducation de son éloquence. Il
apprit le droit civil chez Q. Mucius, l'académicien Philon, Diodote le
stoïcien, lui enseignèrent à fond toutes les parties de la philosophie ; et,
non content de cette foule de maîtres que Rome lui avait offerts, il parcourut
la Grèce et l'Asie pour embrasser le cercle entier des connaissances humaines. Aussi peut-on remarquer, en lisant Cicéron, que ni la
géométrie, ni la musique, ni la littérature, ni aucune des sciences libérales,
ne lui fut étrangère. Il connut les subtilités de la dialectique, les utiles
préceptes de la morale, la marche et les causes des phénomènes naturels. Oui,
estimables amis, oui, c'est de cette vaste érudition, de cette variété
d'études, de ce savoir universel, que s'élance et coule, ainsi qu'un fleuve
débordé, cette admirable éloquence. Et le génie oratoire n'est pas, comme les
autres talents, circonscrit dans des limites étroites et resserrées : celui-là
est orateur, qui peut sur toute question parler d'une manière élégante, ornée,
persuasive, en ayant égard à la dignité du sujet, à la convenance des temps, au
plaisir des auditeurs.
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