Conseils de discrétion. Préparation des sermons.
Direction spirituelle d'un frère. Qualités essentielles du Supérieur: une grande patience et une grande
miséricorde.
Vaugirard, 10
décembre 1866
Mon bien cher enfant en N.S.,
Sous peine de longs retards peut-être, je suis contraint de vous écrire en
quelques lignes seulement. Pour le projet concernant l'école, prenez garde à
l'ébruitement, ne parlez à personne, si vous pouvez, au moins à aussi peu que
possible. Je crois qu'il faut accueillir les propositions avec actions de
grâces, mais sans rien préjuger, demandant temps de réflexion pour vous et
aussi pour le Conseil de la
Communauté qui doit être consulté; nous ne saurions décider
cette question assez grave sans prière et sans examen.
Pour la retraite de St Vincent de Paul, j'aurais mieux aimé, de
prime abord, qu'on vous laissât en ce moment un peu tranquille, mais, s'il y a
une sorte de nécessité, il faut y voir la volonté de Dieu. Je crois que, s'il
en était ainsi, vous auriez à vous préparer un peu sérieusement. On ne fait pas
trois discours de quelque solidité, édifiants, simples, pratiques, sans un peu
de travail et de réflexion devant Dieu; la facilité ne suffit pas; autrement,
on parle avec certaine forme, élégante peut-être, mais presque assurément ce
sont verba et voces. Voyez un peu ce qui est dans la situation, de quels
conseils ils ont besoin, les mesurant à leur portée et facultés; ils sont dans
la charité, mais non dans la voie de perfection. M. Lantiez peut causer
peut-être avec vous utilement à ce sujet, s'il y a lieu.
Je ne crois pas qu'il y ait inconvénient à ce que vous confessiez M. Guillot.
Vous aurez ainsi plus de moyens de le soutenir moralement et de l'encourager;
la qualité essentielle pour un Supérieur, c'est une grande patience et une
grande miséricorde pour les âmes, faibles presque toutes; il faut les soutenir,
les aimer et beaucoup prier pour elles.
Adieu, bien cher ami, mille tendres affections en N.S. à vous et à tous.
Votre Père en J. et M.
Le Prevost
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