Mouvement de personnel. Délicatesse et ménagement de MLP.
pour faire accepter ce changement.
Vaugirard, 11
octobre 1867
Mon bien cher ami et fils en N.S.,
Je me réjouis du bon arrangement que vous avez pris et qui va réveiller, je
l'espère, toute la bonne volonté de M. Moutier pour le bien du patronage. Je
sais combien on a besoin, dans nos œuvres, d'être cordialement et
efficacement aidé et quelle souffrance on éprouve en n'arrivant qu'à des
résultats trop imparfaits.
Je viens vous proposer un petit changement qui ne concerne pas M. Moutier et
qui, je pense, n'apporterait aucun trouble dans l'harmonie de vos dispositions.
Nous sommes obligés de remplacer à Amiens M. Lucien [Jacquart], qui est envoyé
à Metz à la place de M. Brouand André, lequel ne persévère pas dans sa vocation.
Or, le seul frère qui soit susceptible d'être remué en ce moment, c'est M.
Allard, dont je vous parlais dernièrement; il irait à merveille à cet emploi,
mais il est d'Amiens, il y a père, mère, sœurs, frères, etc., etc., chrétiens à
leur manière, mais très disposés, à toute occasion, à détourner leur fils de sa
vocation; impossible donc de le caser là. M. Caille est venu me presser de lui
donner un frère qui eût, sinon des qualités éminentes, au moins un peu de
sympathie pour Amiens; dans ces conditions, il n'a vu que M. Léon [Guichard],
qui a été à Amiens, et qui s'y plaisait. J'ai, en ce moment surtout, si
grand-peur de vous apporter aucune surcharge nouvelle que j'aurais évité à tout
prix une proposition qui m'eût paru le moins du monde défavorable pour vos
services; mais, à part l'inconvénient réel d'avoir à mettre au fait dans ses
travaux un nouveau sujet, je crois pouvoir vous assurer que, loin de perdre au
change en prenant M. Allard, vous y gagneriez. M. Allard, chargé depuis
longtemps déjà des deux sacristies, accoutumé à diriger les enfants dans toutes
les cérémonies, faisant bien les surveillances, suivant ses occupations avec
attention et persistance, conduisant très bien une classe dans les divisions
non élevées, enfin ayant maintenant vraiment le pli de la Communauté et des
exercices communs, serait vite formé et ne vous donnerait nulle difficulté, ni
par son caractère souple et docile, ni par son inexpérience, puisqu'il est
parfaitement apte à remplacer M. Léon. Notre seule raison, je vous l'ai dit,
pour le changement proposé, c'est l'entourage dangereux à Amiens pour M.
Allard. Nos ff. du Conseil pensent avec moi que vous n'aurez nulle cause de
regret en cet arrangement.
Toutefois, mon cher ami, je vous l'ai dit, malgré les besoins urgents d'Amiens,
la difficulté que nous avons d'y pourvoir autrement, nous avons été si
préoccupés de votre fatigue que je suis bien décidé à renoncer à cette
combinaison si vous y voyez une contrariété pour vous.
Je crois que, si vous agréiez cet arrangement, nous pourrions vous envoyer de
suite M. Allard, sauf à vous, quand vos ff. seraient revenus de la retraite, à
lui en faire une petite près de vous, vers le 21 novembre, par exemple, et cela
sans que vous fussiez obligé de vous dessaisir de M. Léon avant le 20 novembre.
Pensez-y un moment devant Dieu, croyez à notre parole sur la valeur de M.
Allard pour le poste qu'il aurait chez vous et répondez-moi avec la liberté
filiale qui vous est, vous le savez, bien tout assurée avec
Votre affectionné ami et Père en N.S.
Le Prevost
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