Emploi du temps de MLP. Comment se comporter dans un
nouveau poste: patience, humilité, "il faut que Dieu y mette sa très grande part". MLP. s'inquiète de sa
santé. Que la communauté observe bien le règlement. Renseignements à prendre
sur un postulant qui a fait un essai chez les Franciscains.
Chaville, 25
novembre 1867
Mon bien cher ami et fils en N.S.,
Je vous écris de notre ermitage de Chaville, où je passe jusqu'ici une partie
de chaque semaine, de samedi à mercredi l'après-midi; de là, je vais à Nazareth
coucher et vivre tout un jour avec ceux de nos frères qui résident dans les deux
maisons; enfin, je reviens le jeudi à Vaugirard. On a pensé que, de cette
façon, je pourrais être un peu utile en ces divers lieux, sans doute faute de
pouvoir en faire beaucoup et sérieusement en aucun d'eux; ils sont rares ceux
dont on peut dire, comme on l'a fait
du divin Maître: transiit benefaciendo.
Pour vous, cher ami, qui demeurez bien assis maintenant à notre chère œuvre
d'Amiens, vous allez, je l'espère, y opérer de saintes choses, mais ce sera
avec patience et longueur de temps; vous prendrez d'abord une connaissance
approfondie de la situation, en vous défiant des premières impressions qu'on a
si souvent à modifier; puis, vos vues étant bien prises devant Dieu, vous
tâcherez, au jour le jour, d'effectuer quelque peu du labeur que vous vous
serez imposé; il s'agit de faire à Amiens une œuvre vraiment utile pour les
pauvres enfants orphelins, apprentis, jeunes ouvriers, et de constituer une
communauté bien posée pour desservir cette œuvre. Il faut que Dieu y mette sa
très grande part, vous avez le bon esprit de le reconnaître; si nous sommes
humbles, fidèles, et aussi si nous sommes hommes d'oraison, cette sainte
entreprise se réalisera.
J'achevais cette phrase un peu longue quand le carillon de la porte m'annonce
votre lettre d'hier, qu'on me remet à l'instant.
Je me contriste un peu des malaises si fréquents de votre santé; êtes-vous bien
sûr qu'il n'y ait pas de votre faute? (gronder les gens qui sont malades, cela
se voit souvent). Prenez-vous les précautions nécessaires, suivez-vous le
régime qu'on vous a prescrit, écoutez-vous les avis de M. Marcaire que j'ai
chargé d'être votre moniteur hygiénique? Faites un petit examen sur ces points
et voyez si vous êtes sans reproche; si c'est le fait de Dieu, Il est le maître,
il faut nous soumettre.
Je crois qu'en faisant des registres séparés, particulièrement pour la
communauté, on s'en applaudirait, la communauté
étant proprement à former et ses traditions à poser à Amiens. Pour l'orphelinat
et le patronage, si le premier a un avenir, ce serait bien d'agir de même.
M. Lantiez, à qui j'ai communiqué votre première lettre, insiste beaucoup pour
qu'on garde ses règlements et qu'on lui signale les atteintes réellement graves
qu'on tenterait d'y apporter.
Je crois que vos honoraires de messes aideraient faiblement à l'entretien de la
chapelle; mieux vaut, vos aumônes essentielles et menues dépenses faites,
remettre le reste à l'économe.
Je vous serais obligé de voir le Supérieur des Franciscains et de lui demander
confidentiellement son jugement sur le nommé Jules Dubois [dit Julien], qui
nous est venu de chez lui (Supr. ) depuis le mois de mai. Ce garçon,
fort laborieux, assez docile et régulier, a une certaine étrangeté dans l'esprit;
il est curieux, indiscret, fait des connaissances au dehors, se mêle de choses
qui ne le concernent pas et pourrait, s'il n'était surveillé, se créer, par
zèle indiscret, des affaires fâcheuses pour lui en même temps que pour la Communauté. Des demi
aveux de sa part me persuadent que, pour des raisons semblables, il avait rendu
sa position difficile chez les Franciscains; ces points sont à éclaircir.
Par la même occasion, vous pourriez utilement faire aussi quelques questions
sur l'autre jeune homme (M. Wattelet, je crois) qui est près de vous à Amiens.
Je vous enverrai une montre dès que j'en aurai l'occasion.
J'ai chargé M. Paillé de toucher les petits bons chez M. Blount, mais c'est 50f. seulement à toucher pour
ceux de Rome avec tout l'arriéré de trois trimestres, ils donneront 40f.
Notre rénovation s'est faite aimablement avec le r.p. Leblanc.
Adieu, bien cher ami, assurez tous nos frères de mes tendres sentiments, M.
Caille en particulier, et croyez aussi à ma vive affection en N.S.
Le Prevost
Je vais m'informer pour l'herméneutique.
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