1433  à M. Tourniquet

Le Saint-Sacrement à la chapelle de Rome; nécessité d'un prêtre dévoué au Cercle. Questions des vacances; fréquentation du Cercle par des ecclésiastiques. Fête de Saint Vincent de Paul. Conseil de sous-officiers.

Vaugirard, 23 juillet 1869

            Mon bien cher enfant en N.S.,

            Nous avons appris avec joie la faveur que vous a accordée le Saint Père, en vous autorisant à garder le Saint Sacrement dans votre petite chapelle; j'ai la confiance que la présence de notre divin Seigneur en votre maison sera un puissant stimulant pour accroître votre piété, vous inspirer à l'intérieur l'esprit de charitable union et, pour le dehors, un zèle de plus en plus ardent dans vos œuvres. S'il en était autrement, vous n'auriez pas bien correspondu à la grâce insigne qui vous a été accordée.

            Encouragez beaucoup M. l'abbé Louis [Klingenhofen] par le respect et l'affection que vous lui montrerez; il peut faire beaucoup de bien dans la Légion, à la longue, et s'il ne se rebute pas des difficultés des premiers temps; son éloignement serait certainement un vrai malheur pour les pauvres soldats qui ont tant besoin d'appui spirituel. Il n'est pas possible que son zèle échoue entièrement; il y a beaucoup d'âmes simples et droites dans la légion, il les gagnera successivement, à mesure que sa position se fera parmi elles; je prierai en union avec vous pour que Dieu attire à Lui bientôt beaucoup de cœurs.

            Je suis heureux des bonnes dispositions de notre jeune Rabusier; assurez-le que je suis des yeux tous ses efforts dans le bien; M. Faÿ va lui écrire.

            J'écris ici un mot à M. Charrin; qu'il prenne patience; comme vous le pensez bien, s'il persiste à désirer son retour près de nous, j'aviserai à le rappeler au mois d'octobre, quand il sera possible de lui donner un remplaçant; jusque là, qu'il soit courageux et laisse de lui un bon souvenir à Rome, s'il doit la quitter.

            M. Emile [Beauvais] me parle, en effet, des bains de mer à Palo ou à Civita; on pourrait demander l'avis du médecin sur le bien que vos santés en pourraient retirer.

            M. Cuvinot a été opéré de nouveau d'une façon plus radicale que la première fois; il va aussi bien qu'on peut l'espérer après une si rude épreuve; on ne peut encore rien présumer sur les suites.

            Je crois qu'il est désirable que M. Emile soit bien prudent dans ses rapports avec M^gr Daniel; le mieux est, il me semble, d'avertir simplement les ecclésiastiques qui viennent au Cercle (avec beaucoup de politesse et de charité) qu'il est réservé aux militaires. S'il en est quelques-uns dont on soit bien sûr et qui vous soient bien connus, on peut les inviter à voir M^gr Daniel, afin d'obtenir de lui une permission de fréquenter le Cercle; leur admission est une véritable exception et, puisqu'il s'agit d'ecclésiastiques, c'est à l'aumônier à juger de ce qui les concerne. En marchant ainsi simplement, on n'aura, je pense, aucune difficulté.

            Nous avons eu, à Chaville, une fête de S^t Vincent de Paul très aimable; nulle contrariété, sainte union et pure allégresse en Dieu tout le jour; j'espère que vous en aurez eu à Rome quelque ressentiment. Les filles de S^t Vincent y sont maintenant et voilà que vous y êtes aussi; le Père ne saurait être loin de ses enfants, ayez soin de l'invoquer souvent.

            S^t-Charles se soutient, non sans quelques difficultés, à cause de l'insuffisance de liberté et de loisir pour M. Gresser; M. Girodon, empêché par d'autres occupations, ne pourra plus faire que le service spirituel du samedi soir et du dimanche matin; M. Faÿ devra revenir vers midi pour le reste; je ne sais si cet arrangement sera bien bon; ne cessez pas de prier pour vos enfants de S^t-Charles.

            Adieu, mon cher enfant, rappelez-moi au souvenir des rr.pp. Brichet et Laurençot et offrez-leur nos respects ainsi qu'à M. l'abbé Louis.

            Votre tout affectionné ami et Père

                                                                                                Le Prevost

            P. S. M. Hello vient de me communiquer une lettre où vous lui parlez d'un Conseil de sous-officiers que voudrait faire le Capitaine Prevost. Vous n'expliquez pas, ou je n'ai pas compris, si ce Conseil devrait régler les mouvements du Cercle et s'il ne pourrait pas renouveler pour vous les inconvénients de l'ancien Conseil; je ne puis donc vous donner d'avis; tout ce que je vois, c'est qu'il faudrait éviter de froisser le Capitaine Prevost qui nous aime et qu'il nous importe de ne pas mettre contre nous, mais qu'il est bien à désirer aussi que vous n'ayez pas dans votre action les gênes d'une direction trop minutieuse; que le Bon Dieu daigne vous éclairer pour éviter à la fois ces deux inconvénients.