1439  à M. de Varax

Le frère Cauroy éprouvé dans sa vocation. Que M. de Varax fasse appel "au bon sens et au cœur" de ce frère, pour le ramener à d'autres sentiments.

Chaville, 12 août 1869

            Mon bien cher ami et fils en N.S.,

            Je prie avec vous pour notre jeune Cauroy; son découragement, espérons-le, se passera comme plusieurs autres, sous l'influence de la grâce et de ses propres réflexions; il a du bon sens et du cœur, c'est plus qu'il n'en faut pour le ramener à d'autres sentiments. Ce serait pour lui, en effet, le comble de la folie et de l'ingratitude que de briser là, sans nulle raison valable, sa vocation et tout son avenir, sans aucune perspective, tant soit peu consistante, d'une position convenable dans le monde. Ses qualités auront valeur dans le service de Dieu, parce qu'elles y sont propres; elles serait peu estimées dans le monde et ne le mèneraient à rien.

            Si, comme on le peut penser, il craint de se retrouver à Amiens dans une condition défavorable pour étudier, étant partagé entre ses classes et les services des œuvres, il ne faudrait pas hésiter un moment à lui promettre qu'aussitôt après l'ordination de M. Trousseau, il reviendrait ici pour continuer ses études d'une façon régulière et avec entière liberté, soit à Versailles, soit en quelque autre séminaire. Il a déjà souffert du décousu de ses précédentes études, on ne pourrait lui imposer une condition pareille sans qu'elle lui parût meilleure qu'une autre pour lui, eu égard à ses aptitudes.

            Si, contre mon attente, vos bons conseils ne le ramenaient pas à de meilleures pensées, il faudrait l'envoyer ici, afin que je converse avec lui à loisir; il sait l'intérêt tendre que je lui porte, je crois qu'il examinerait volontiers avec moi ce que ses véritables intérêts demandent.

            Adieu, mon bien bon ami, j'attends votre réponse pour le pèlerinage projeté de nos persévérants; il leur resterait, s'il n'y a nul obstacle chez vous, à faire les démarches pour obtenir les demi-places.

            Votre ami et Père affectionné

                                                                                             Le Prevost