1442  à M. Tourniquet

Encouragement à faire face aux difficultés. Servir Dieu de façon désintéressée.

Chaville, 17 août 1869

            Mon bien cher ami et fils en N.S.,

            Votre lettre du 12, qui m'est arrivée hier, me met en embarras; elle semble supposer que j'en ai reçu de vous une autre presque aussi récente et qui m'aurait entretenu de plusieurs affaires. Cette lettre ne m'est point parvenue.

            Ainsi, dans celle du 12, vous me demandez trois solutions:

            1° - sur l'échange des timbres-postes,

            2° - sur le tabac,

            3° - sur M. Charrin.

            Pour ce dernier, votre lettre du 5 de ce mois me disait qu'il était toujours découragé et avait peine à attendre le moment que j'avais marqué pour son rappel, si, définitivement, il ne savait pas porter les difficultés de sa position. Je crois toujours qu'il serait plus sage à lui d'attendre ainsi patiemment; s'il ne s'en trouve pas capable, renvoyez-le près de nous quand vous croirez pouvoir le faire prudemment. Je pense qu'en motivant ce retour sur des raisons de santé, vous obtiendriez aisément du Comité (pour cette raison ou quelque autre qui vous paraîtrait meilleure) les frais de son retour; j'obtiendrai ici ceux du voyage de son remplaçant. Mais attendre serait mieux, l'air n'est pas bon en France présentement, on y ressent en plusieurs lieux des influences cholériques, pas très considérables, mais cependant sensibles.

            Pour le tabac et les timbres-poste, aucune de vos lettres ne m'en a parlé.

            J'ai cru voir aussi que M. Rabusier n'allait pas bien ou même qu'il serait parti, puisque vous me dites avoir vu M. l'abbé Louis le matin après le départ de Rabusier. Ai-je mal compris?

            Pour l'affaire principale contenue dans votre lettre du 12, attendons, ainsi que vous le dites bien, il se peut que la chose ne se réalise pas ou que, faite, elle soit moins gênante que nous ne le craignons. Notre position ne sera jamais mauvaise, en ce sens que nous agissons avec un parfait désintéressement; nous tiendrons bien dans l'intérêt de la cause sainte que nous servons, nous nous soutiendrons, s'il le faut, à l'aide des amis que nous avons à Rome, et, si on nous rend la condition insoutenable, nous nous retirerons. Nous n'en sommes pas là, laissons dire les gens mal disposés, prions Dieu et confions-nous en Lui. C'est Lui que nous servons, Il fera de nous ce qu'il voudra dans sa sagesse.

            Prenez conseil, en cas nécessaire, près des rr.pp. Brichet et Laurençot. A l'occasion, rappelez-moi à leur souvenir.

            Mille affections à vous et à nos ff.

            Votre ami et Père bien dévoué en J. et M.

                                                                                             Le Prevost