Mouvements divers de personnel pour suppléer le père de
Varax et le frère Tourniquet. « Tout pousse à renverser nos édifices; les moines qui faisaient des
corbeilles... »
Chaville, 24
mai 1870
Mon bien cher ami et fils en N.S.,
M. d'Arbois me dit, et je pense aussi, que vous feriez votre petit voyage de
santé en repos d'esprit plus complet si votre petite communauté n'était pas
tout à fait dépourvue de surveillance durant votre absence. Or, M. d'Arbois
devant passer trois semaines à Angers pour la vente, si vous faisiez coïncider
le commencement de votre absence avec le moment de son arrivée, ce serait
autant de gagné et le délaissement des ff. et des œuvres, étant réduit à ce qui
resterait de temps pour compléter la durée de votre repos, serait relativement
très supportable. On peut objecter, il est vrai, que Mgr l'Evêque
d'Angers peut arriver durant votre absence, mais la venue du Prélat, quant à sa
date, est sans doute bien incertaine et vous pourrez difficilement y
subordonner l'heure de votre départ. En supposant même que vous fussiez
réellement éloigné quand il viendra, une lettre polie lui ferait aisément
comprendre et agréer les raisons graves qui nécessitent votre absence.
Je serais bien aise que vous goûtiez cet arrangement, la communauté,
aujourd'hui plus nombreuse, ne me paraissant guère pouvoir demeurer seule
longtemps, et les moyens de vous remplacer étant pour nous bien difficiles.
M. Georges [de Lauriston] est obligé d'aller temporairement suppléer M.
Jean-Marie [Tourniquet] dont la santé est altérée; c'est un vide qui va nous
causer quelque embarras. M. Audrin ira momentanément à Vaugirard, mais non sans
détriment pour Chaville. Que les combinaisons humaines sont fragiles! mort,
maladies, défaillances des volontés, accidents sans nombre, tout pousse à
renverser nos édifices; les moines, qui faisaient des corbeilles pour les
détruire et les refaire ensuite, avaient presque la même tâche que nous; tout
est bien néanmoins, si le Maître Suprême est content.
Adieu, mon bien cher enfant, je me réjouis à la pensée de vous revoir, mais
c'est pour si peu de temps! les affections et les joies qu'elles donnent sont
encore comme les corbeilles, à peine produites, elles sont défaites.
Votre tout affectionné ami et Père en N.S.
Le Prevost
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