1567  à M^me et M^lle Salva

Emprunt contracté auprès d'elles. Situation de l'Institut au début de la guerre.

Vaugirard, 5 août 1870

            Bien chères amies,

            M. de Lauriston étant à Rome depuis quelques semaines pour remplacer un de nos ff. des Cercles militaires qui était extrêmement fatigué, je ne sais où il en est avec vous pour les intérêts de votre prêt; si je ne me trompe, six mois doivent être échus du 1^er juillet; comme l'échéance, en tout cas, doit être à peu près à cette date, je vous envoie ci-joint 500f en vous priant de m'en adresser un reçu, au nom de M. de Lauriston, pour l'Œuvre de N.D. de Grâce, à Grenelle, laquelle est votre débitrice.

            Je ne vois rien à vous dire aujourd'hui; nous souffrons, comme tout le monde, de la guerre, l'affliction du moment; trois de nos MM. nous sont pris actuellement, je ne sais si d'autres encore nous seront enlevés. Parmi nos œuvres, des multitudes de jeunes gens, mariés ou non mariés, sont appelés au service; le Cercle des Jeunes Ouvriers de M. Maignen en perd 67 pour sa part, et ainsi à peu près pour les autres œuvres.

            Chez nous, deux ou même trois de nos MM. ecclésiastiques sont épuisés par un travail trop continu et vont être contraints d'interrompre pour un temps leurs occupations ordinaires. Trois de nos séminaristes seront ordonnés prêtres dans quelques jours, mais de très jeunes gens ne peuvent suppléer des hommes de maturité et d'expérience; nous espérons que Dieu y pourvoira.

            Pour ce qui me regarde, les chaleurs continues ont achevé de briser mes jambes; je ne puis plus aller hors de la maison, sinon en voiture; reprendrai-je un peu de force à l'automne, j'en doute, à cause de la faiblesse de mon estomac, cause de tous mes épuisements.

            Donnez-moi de vos nouvelles; les chaleurs n'ont pas dû vous épargner, non plus que nous; si vous n'êtes pas trop faibles, un peu de mouvement, après que la température aura changé, vous serait salutaire; pourquoi n'auriez-vous pas fait un petit voyage vers la mer; quelques bains auraient été fortifiants pour Maria, et le bon air vif eût fait aussi beaucoup de bien à sa mère. Il n'est pas trop tard pour y songer et le chemin de fer vous rendrait ce voyage si facile!

            Adieu, bien chères amies, je pense souvent à vous et je prie aussi pour vous; ne m'oubliez pas de votre côté. Ma tâche a été, cette année, plus rude que de coutume, et j'étais cependant plus faible en même temps pour la porter; Dieu fera plus, je l'espère, à mesure que je ferai moins.

            Votre tout affectionné frère et oncle

                                                                                                Le Prevost