Au
sujet des frères ambulanciers volontaires. Ne pas abandonner nos œuvres pendant la guerre.
Chaville,
21 août 1870
Mon bien cher ami et fils en N.S.,
Je vois, par une lettre écrite par vous à M. de Varax, que je ne me serais pas
assez expliqué relativement à la composition de l'ambulance spéciale que nous
avons été autorisés à former pour les blessés de l'armée. Nous ne devions y
faire entrer que ceux de nos ff. dont le départ était exigé par les décisions
récentes du Gouvernement. Or, par votre lettre du 17 de ce mois, vous me dites
vous-même: l'exemption obtenue par M. Ginet, lors du tirage à la conscription,
paraissant être maintenue, il n'y a point à craindre qu'il soit appelé. D'un
autre côté, les élèves des grands séminaires étant aussi mis jusqu'ici hors de
cause, M. Perthuisot est également exempté. MM. Moutier et Léon Guichard ayant
préféré se rendre à l'armée, je ne vois pas ce qui nous restait à faire de plus
que nous n'avons fait. Pour ce qui vous regarde personnellement, mon bien cher
enfant, je n'ai vu dans votre offre de vous joindre à l'ambulance que cette
disposition, habituelle chez vous, de vous sacrifier au bien, de quelque façon
que ce soit. Mais votre éloignement d'Angers, dans les circonstances présentes,
eût été la mort des œuvres que vous dirigez et nous devons tendre, au
contraire, à les conserver comme les autres, sinon florissantes, au moins
vivaces et susceptibles de se relever après l'orage. J'espère que nous y
parviendrons; le Noviciat va se trouver plus effacé que les autres maisons, son
personnel étant réduit presque à zéro, et la commune ayant accepté avec
empressement l'offre d'y faire un asile pour les blessés; cependant, quelques
ff. y restent encore et, jusqu'à nouvelle nécessité, nous y maintenons les
offices et messes ordinaires de la chapelle, pensant que c'est la meilleure
sauvegarde du foyer.
Nous donnons seulement 15 ou 16 de nos ff. à l'ambulance, avec quelques membres
des Conférences ou de nos Cercles et quelques religieux Lazaristes, Spiritains
et des Missions Etrangères, 4 Sulpiciens, MM. Lantiez et Hello aumôniers; en
tout 45, je crois. L'administration y ajoute, je pense, un autre prêtre, un
pasteur, un chirurgien en chef, 12 aides chirurgiens, 6 soldats pour les
fourgons, etc. Le départ aura lieu mercredi 24438; je ne sais au juste
si c'est pour le côté de Metz ou autrement. L'engagement est pour tout le temps
de la guerre. Tous résisteront-ils aux fatigues et aux dangers? Nous ne
saurions le prévoir, mais je l'espère; Dieu et la Ste Vierge
les garderont et, si quelqu'un venait à succomber, il aurait le mérite, dans
les combats du Seigneur, d'être mort les armes à la main.
M. Ginet a demandé instamment à demeurer à Angers jusqu'au mois d'octobre; vous
me direz si vous y voyez quelque inconvénient.
Pour M. Perthuisot, je désire toujours qu'il se prononce; veut-il sérieusement
être prêtre et religieux chez nous? Devons-nous aviser à le maintenir sur la
liste d'un Evêque pour le sauver d'un appel à l'armée?
La poste part, je finis; on craint la venue de l'ennemi jusqu'à Paris; que la
volonté de la divine Sagesse s'accomplisse; pour nous, veillons et prions. On
dit, dans nos maisons, quatre fois par jour: Sub tuum præsidium, avec
trois fois: Auxilium christianorum.
Votre affectionné ami et Père en N.S.
Le Prevost
Souvenirs à nos ff.
L'ordination jeudi 25 seulement. Priez pour les ordinands. J'aviserai, dès que
possible, en ce qui touche M. Lainé [Ad.]
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