Préparatifs
du siège de Paris. Installation du Noviciat à Tournay.
Vaugirard,
11 septembre 1870
Mon bien cher ami et fils en N.S.,
Votre lettre nous a fort réjouis et rassurés; nous bénissons Dieu qui vous a conduits
par la main jusqu'à votre destination et qui vous a fait trouver sur votre
route l'appui si bienveillant de M. Lefort. J'ai écrit à ce bon Monsieur pour
le remercier et, en même temps, pour lui recommander nos six novices: MM.
Magnien, Coquerel, Vialloux, Pialot, Lepage et Prévost, partis d'ici le 9 pour
vous rejoindre; j'espère qu'ils sont près de vous, arrivés sans encombre.
Je ne sais s'ils pourront aussi trouver place avec vous au séminaire [de
Tournay].
Vous ne m'avez pas dit si c'était à titre provisoire que vous y avez été reçus,
ni comment vous vous procurez la nourriture.
Peut-être pourrez-vous communiquer avec nos ff. de l'ambulance, présentement à
Sedan. Je viens de leur écrire à cette adresse qu'ils me donnent: M. Pierre
Dutilleux, pour remettre à M. l'abbé Lantiez, poste restante, à Bouillon
(Belgique); mais je crois qu'ils n'envoient chercher les lettres que quand ils
sont prévenus. Je ne sais à quelle distance Bouillon se trouve de Tournay.
L'ennemi n'est pas encore aux portes de Paris; il semble aller en sens divers
sur sa route pour rançonner et affamer les villes; on dit qu'il veut dépouiller
la contrée autour de Paris et le prendre ensuite par la famine.
Nous avons envoyé MM. Frézet et
Barthélemy [Marchand] à Amiens; MM. Planchat, Deny, Camille [Dupit] demeurent à Ste-Anne.
Nous avons gardé encore vingt enfants
provisoirement et dix apprentis ou
persévérants; nous verrons ce que les circonstances demanderont, nous allons au
jour le jour.
Je vous ai envoyé M. Coquerel pour qu'il vous serve d'économe; il était exposé
à être pris journellement pour le service militaire.
Je vous recommande de tenir bien sûrement enfermées les pièces que je vous ai
remises.
Tous les jours, nous prions fidèlement pour nos ff. dispersés, espérant que
Dieu nous réunira tous un jour; mais que les réunions de la terre sont faciles
à rompre! Heureusement, viendra un jour la bienheureuse réunion du Ciel qui
durera sans fin ni brisement.
Je vous embrasse tous dans les Cœurs sacrés de J. et de M. Ecrivez-moi vite
pour m'ôter toute inquiétude au sujet des derniers partis; j'ai besoin de les
savoir près de vous.
Votre dévoué ami et Père
Le Prevost
Offrez mes respects aux vénérables prêtres qui vous ont accueillis, à M. le
Supérieur en particulier.
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