1602  à M. J. Faÿ

Demande de nouvelles. Renseignements sur les œuvres de Paris. MLP. regrette le peu de prières publiques «pour apaiser Dieu et mériter qu'Il pardonne à son peuple».

Vaugirard, 14 décembre 1870

            Mon bien cher ami et fils en N.S.,

            Je vous ai écrit, il y a quelque temps, par ballon; aucune réponse ne m'étant venue, je ne sais si ma lettre vous est parvenue; j'y avais joint une carte, au moyen de laquelle vous auriez pu répondre par oui ou par non à quatre questions qui étaient posées; mais je crois que les inscriptions que j'avais mises n'étaient pas régulièrement faites, il se pourrait donc que ce fût pour cette raison que mon envoi n'eut point eu de suite. Je vais renouveler mes questions; vous auriez à répondre par oui ou par non; dans le même ordre où je les pose, dans les colonnes tracées sur la carte ci-jointe:

            1^e question. - Vous portez-vous tous bien ou au moins passablement? (Colonne n° 4 sur la carte)

            2^e question. - (Colonne n° 5) Avez-vous pu subvenir à vos besoins et pouvez-vous marcher avec les aides qu'on vous a procurés jusqu'à ce que nous soyons délivrés ici?

            3^e question. - (Colonne n° 6) Avez-vous avec vous, (M. Baumert excepté, qu'on me dit être à Londres) tous ceux qui sont partis en votre compagnie ou qui vous ont rejoints depuis de Paris?

            4^e question.- (Colonne n° 7) Est-il à votre connaissance que MM. Chaverot et de Lauriston se portent bien?

            A ces questions, vous répondrez par oui ou par non, en chacune des colonnes que je viens d'indiquer.

            A la case ou colonne n° 1, vous inscrirez le nom du pays où vous êtes (Tournay Belgique); à la 2^e colonne, vos initiales; à la 3^e, mon adresse à Paris-Vaugirard, Chemin du Moulin, n° 1; aux autres colonnes, oui ou non , selon la convenance. On nous a écrit de Tours, par télégraphe, que M. Hello était à Angers, MM. Streicher et Jouin à Tournay; d'Angers, une autre dépêche nous a dit que ceux de Rome étaient sauvegardés; comment? Nous ne savons; qu'Amiens était au complet, M. Baumert à Londres, MM. Ginet et Guichard soldats.

            A Paris, le siège a de grandes gênes, mais pas intolérables jusqu'ici; nous ne savons ce que l'avenir nous apportera. Nos œuvres, amoindries, subsistent néanmoins; Paris et la France sont en armes et veulent résister énergiquement à l'ennemi; sa férocité dans cette guerre a soulevé partout la colère et le besoin de le repousser à tout prix.

            On prie assez généralement; les militaires, pour la plupart, se montrent chrétiens, nous n'avons qu'à nous louer d'eux dans les ambulances de nos maisons; mais les masses, dans leur ensemble, ne sont pas encore converties; jusqu'ici, pas de prières publiques ou de grande manifestation pour apaiser Dieu et mériter qu'Il pardonne à son peuple; l'autorité ecclésiastique se montre timide à les provoquer, par crainte, sans doute, des oppositions ou de quelque scandale.

            Je suis persuadé que vous priez avec nous; tous les soirs, nous prions pour les ff. absents, et aussi pour nos orphelins éloignés forcément de nous; il en reste néanmoins 35 à Vaugirard.

            Affections à tous.

            Votre dévoué ami et Père

                                                                                                Le Prevost

P. S. Après avoir rempli la carte, vous la remettrez au Directeur de la Poste, avec affranchissement de 1f. Il se chargera de faire parvenir vos oui et non .