Le
père de Varax nommé Vicaire général:
encouragements de l'Evêque de Bayeux. M. Faÿ est à Chaville; demande d'un père jésuite pour fonder le Noviciat. Mort du
frère Jean-Marie Tourniquet.
Chaville,
4 juillet 1871
Bien cher ami et fils en N.S.,
Je vous remercie de vos deux bonnes lettres des 26 juin et 1er juillet.
Si je n'ai pas répondu à la première, c'est que, outre le manque de choses
intéressantes à vous communiquer, je craignais que ma réponse ne
vous trouvât plus à Nevers. Je comptais sur votre prompte arrivée à Allevard,
et j'ai appris avec satisfaction que vous y étiez installé et en cours de
traitement.
Le bref de votre nomination comme Vicaire Général est déjà entre mes mains. Le
p. Brichet a mis à l'obtenir un empressement dont nous ne saurions trop lui
savoir gré. Je bénis Dieu de tout mon cœur de ce résultat. C'est lui seul qui
l'a préparé et amené; nous avons donc tout lieu d'attendre en pleine confiance
qu'Il achèvera son œuvre en vous accordant abondamment ses grâces et son
assistance. Remercions-le d'avoir ainsi prévenu le fléchissement qu'aurait
éprouvé la direction de notre famille par suite de l'affaiblissement de mes
forces.
La lettre de Mgr de Bayeux [Mgr Hugonin] ne me semble pas
répondre vaguement à nos projets. Ces paroles: "Votre
œuvre est l'une des plus importantes de notre époque.
Les prêtres ordinaires ne suffisent plus. Il nous faut des
apôtres. Votre œuvre nous en donnera, etc..." expriment un
sentiment déjà, à diverses reprises, recueilli de la bouche du p. Olivaint et
d'autres de nos amis, justes appréciateurs des besoins du temps et de notre
but. Elles viennent donc nous confirmer encore dans la voie où nous nous
appliquons à entrer, de développer et former plus puissamment que par le passé
notre personnel. D'autre part, elles nous donnent bon espoir qu'au moment
opportun, nous trouverions dans ce bon prélat un secours efficace pour
l'exécution de nos plans.
M. d'Arbois est à Chaville. Vous vous êtes croisés en route. Il regrette aussi
vivement d'avoir été privé de vous recevoir et voir à Angers. Ses dispositions
et ses sentiments se mettent bien en harmonie avec les vôtres. Il est sur le
point de repartir. Il est arrivé ici exténué, et il me paraît emporter de ce
court repos une bien petite provision de forces.
M. Faÿ est également des nôtres. Son séjour à Chaville ne lui sera pas inutile
au point de vue de sa santé. Il est encore en possession d'un rhume négligé
datant de l'année passée. Il nous a rapporté les pièces et titres qu'il avait
transportés avec lui à Tournay, afin de les mettre en sûreté.
Le Conseil s'occupe des mesures à prendre pour l'œuvre des noviciats. Espérons
en l'aide du divin Seigneur pour leur issue favorable, aussi bien que pour
celle de la demande d'un p. Jésuite dont votre lettre me donne des nouvelles
satisfaisantes. Je ne me rappelle pas avoir modifié en rien mes première
instructions au sujet de l'écoulement successif des enfants de l'orphelinat
d'Amiens.
Adieu, mon bien cher ami et fils en N.S.; nous prions tous les jours le bon
Maître pour que votre voyage ait tous les bons résultats que nous en attendons
au profit de votre santé.
Votre ami et Père en
N.S.
Le Prevost
P. S. 9 juillet. - Je ne m'explique
pas comment cette lettre n'est pas partie et comment elle me revient après
plusieurs jours de sa date; je l'envoie un peu confus. J'ai, du reste, à y
ajouter un fait grave et triste: hier, j'ai reçu une dépêche m'annonçant que
notre f. Jean-Marie [Tourniquet], atteint d'un mal de gorge d'abord peu
inquiétant, s'est trouvé tout à coup beaucoup plus malade, une petite vérole
rentrée s'étant déclarée, et qu'enfin, après d'assez vives souffrances, il a
rendu son âme à Dieu vendredi, à 4h.1/2 de l'après-midi.
M. Faÿ, à ce moment en route pour rentrer à Tournay, ne sera pas arrivé à temps
pour lui fermer les yeux. Il a pu recevoir, heureusement, les derniers
sacrements. Je n'ai pas besoin d'ajouter que cette nouvelle nous a frappés au
cœur. Aujourd'hui, nos ff. ecclésiastiques ainsi que moi avons tous offert le St
Sacrifice à son intention. Quelle consolation d'avoir une telle puissance pour
assister les âmes qui nous sont chères et pour calmer notre douleur quand nous
en sommes séparés!
Votre dévoué ami et
Père
Le Prevost
P. S. Tous vous offrent respect et
dévouement.
|