Il l'exhorte à se décider: peu importe le premier
travail, il faut se lancer. Avantages de son installation immédiate au Patronage des apprentis. MLP. pose les
principes de son apostolat: -"se prêter à toutes les œuvres de
miséricorde, -faire des choses petites et que le monde apprécie peu, -la forme
et la matière ne sauraient manquer au dévouement.
Paris, 27
décembre 1844
Mon bien cher frère,
Je n'ai que le temps de vous écrire deux mots pour vous
dire que je viens, comme je vous l'ai annoncé il y a quelques jours, (par une
lettre qui s'est croisée avec la vôtre) de m'adresser à Mgr l'Évêque
d'Angers pour solliciter plus directement son appui et ses conseils et pour le
conjurer aussi de vous envoyer au milieu de nous. Nous sommes si peu forts et
l'œuvre qu'il s'agit d'entreprendre est si haute, qu'il nous faut
absolument réunir nos moyens sous peine de rester en chemin sans atteindre le
but désiré. Je vous ai dit, dans ma dernière lettre, quelle serait la première
occupation donnée au zèle de nos frères, mais vous aurez compris comme moi
qu'il importait peu au fond de quelle nature serait le premier travail qu'ils
devraient entreprendre. Si Dieu daigne les bénir, ils devront successivement en
s'accroissant en nombre, se prêter à toutes les œuvres de miséricorde qui
pourront leur convenir; or, commencer par les enfants est prendre la chose par
la base et satisfera d'ailleurs le vœu de leur humilité, savoir: de faire des
choses petites et que le monde apprécie peu. Si vous, ou quelque autre occupé
d'abord à ce soin y a peu de disposition, il n'importe; il pourra plus tard
avoir une autre voie et les formes et la matière ne sauraient manquer au
dévouement.
Ce qu'il vous faut aujourd'hui, c'est un asile qui
n'attire pas les yeux, c'est un prétexte pour deux, trois ou quatre de vous de
se réunir et de vivre ensemble; or, l'offre que fait la Société de
Saint-Vincent-de-Paul semble de tout point favorable et providentielle; elle ne
s'inquiète et ne se doute de rien, elle ne vous interroge point sur vos vues
ultérieures et trouve tout simple que quelques-uns de ses membres se dévouent
plus particulièrement à l'une de ses œuvres. Vous pourrez donc en paix former
et étudier vos cœurs, entendre la parole intérieure et vous livrer à ses
inspirations. Nous prions bien instamment ici pour que notre bon Seigneur
d'Angers vous envoie à nous; notre chère œuvre, si longtemps arrêtée dans ses
premiers actes, souffrirait, je le crains, 125 de nouveaux délais, si
nous n'avions votre coopération. Nous remettons tout aux mains du divin
Seigneur; puisse sa charité qui nous a rapprochés, je le crois fermement, nous
réunir pour sa plus grande gloire.
Rappelez-moi au bon souvenir de notre frère, M.
Renier et donnez-moi vous-même quelque part à vos prières; les miennes vous
seront fidèlement rendues à l'un et à l'autre.
A vous dans les cœurs de J. et M.
Le Prevost
P.S. Le Président Général de la Société de
Saint-Vincent-de-Paul sait seul votre dessein et celui de nos amis; il l'a
appris avec bonheur. Il a promis de le favoriser de tous ses moyens.
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