243  à M. Caille

La charité et la prière sont les gardiennes de l'affection fraternelle. MLP. l'invite à venir à la retraite de Communauté. Nouvelles des frères et des oeuvres.

Paris, 19 avril 1853

Très cher ami et fils en N.S.,

Je ne vous ai point écrit depuis quelque temps, je vous savais très occupé de votre loterie et je pensais qu'il était hors de propos de vous donner des distractions. Je suppose qu'elle est maintenant tirée, ou du moins qu'elle va l'être, et que vous allez retrouver un peu de liberté; je vous écris donc ces quelques lignes, afin que nous ne restions pas trop longtemps éloignés de votre souvenir; écrivez-nous de votre côté, dès que vous serez dégagé de vos travaux extraordinaires. Un proverbe arabe dit: "Quand les chemins de l'amitié ne sont pas fréquentés, ils se couvrent de ronces." C'est avec raison, les impressions s'effacent vite de nos âmes mobiles et oublieuses; heureusement pour nous, la charité les conserve et la prière les ravive; restons donc bien fidèles, cher ami, à la charité et à la prière; elles seront les gardiennes de la sainte affection qui nous unit.

Je vous donne avis, mais sans grande espérance que vous en puissiez profiter, que notre première retraite va bientôt commencer. Elle s'ouvrira lundi prochain 25 de ce mois et durera jusqu'au jeudi inclusivement. Elle nous sera donnée par le r.p. de Ponlevoy, Supérieur de la Maison des Jésuites de la rue de Sèvres, homme d'une haute piété et d'un mérite éminent. Si vos affaires vous amenaient ici dans cet intervalle, peut-être pourriez-vous participer au moins à quelqu'un des exercices; sinon, vous vous unirez à nous d'intention et de cœur, en attendant les temps où le bon Maître, vous affranchissant d'une partie de vos charges, laissera un peu plus d'espace devant nous.

Notre petite famille va bien; elle parle souvent du bon frère d'Amiens et regrette bien de ne l'avoir pas vu depuis longtemps; les derniers venus souhaitent vivement de faire sa connaissance.

J'en étais là de ma lettre quand notre bon Confrère d'Amiens nous est arrivé avec votre lettre; vous pensez bien qu'il a été accueilli avec joie, car il nous apportait de vos nouvelles et de plus l'assurance que vous nous arrivez au commencement de la semaine, tout juste à point pour prendre au moins une petite part aux exercices de la retraite; cela vous fera quelques heures de repos dont vous avez grand besoin après les fatigues excessives que vous avez eues. Je bénis le Seigneur du succès qu'il a donné à vos efforts et je Le prie de le faire tourner à sa gloire.

M. Vasseur va bien, il sera dans une grande joie de vous voir. Nous recevrions avec plaisir un jeune frère tailleur, s'il avait les qualités que demande notre genre de vie; vous êtes bon juge en ce sens, je m'en rapporte pleinement à votre examen.

Nous refusons tous les jours plusieurs enfants, notre maison étant déjà extrêmement chargée; nous examinerons plus tard avec vous, lorsque vous serez ici, ce que le bon Dieu demande de nous sur ce point.

Tous nos frères vous embrassent tendrement et moi je suis, dans les Cœurs de J. et de M., bien affectueusement.

Votre ami et Père

Le Prevost