349  à M. Vasseur

Ne pas se troubler du manque de ferveur sensible. Dévotion mariale: "un enfant passe toujours avec sa mère sans difficulté". Se laisser conduire par les Supérieurs. Esprit d'enfance.

Vernet, 9 février 1856

Cher enfant en N.S.,

Je vois avec plaisir que vous et nos bons frères ne m'avez pas encore oublié; je n'étais dit: on m'écrira pendant les premiers mois, mais peu à peu on s'accoutumera à mon absence, les choses se poseront et s'arrangeront sans moi, si bien qu'à mon retour je trouverai la place prise et, comme M. de la Salle, je serai mis dehors²³⁰. Mais il paraît jusqu'à présent qu'il n'en est pas ainsi; cependant, comme il ne faut pas vous mettre à trop longue épreuve, je tâcherai que mon absence ne se prolonge plus beaucoup. Seulement je ne serai pas encore bien solide quand je reviendrai, et, si vous ne voulez pas me mettre en pièces, il faudra me prendre avec un peu de précaution. Je prie toujours beaucoup pour vous, cher enfant, et j'ai la confiance que la T. S^te Vierge veillera toujours sur vous; quoique vous puissiez avoir un peu moins de ferveur sensible, demeurez-lui fidèle, elle ne cessera point d'être votre Mère, et vous, mon cher Alphonse, vous ne cesserez point de demeurer son bon et sage enfant. Soyez ainsi toute votre vie et, au dernier jour, présentez-vous à elle en cette disposition, elle vous prendra par la main et vous entrerez avec elle; un enfant passe toujours avec sa mère sans nulle difficulté.

Votre sort, très cher enfant, est entre vos mains; vous avez certainement tout ce qu'il faut pour devenir un bon religieux, veillez et priez, et la persévérance ne vous manquera point. Il me semble bien qu'il en est ainsi également de notre bon petit Ernest; seulement il ne se défie pas assez de son inexpérience; s'il veut marcher sûrement et en paix, il faut qu'il se laisse conduire comme un petit enfant par son père Myionnet; un peu plus tard, quand il sera plus éclairé et plus avancé, il verra combien étaient sages les conseils qui lui ont été donnés. Vous qui êtes l'aîné, veillez sur lui, soutenez-le doucement et affectueusement, priez beaucoup pour lui, vos prières l'ont aidé à venir, il faut qu'elle l'aident aussi à persévérer.

Je vous embrasse tendrement.

Votre Père

Le Prevost