466  à M. Halluin

Mouvement de personnel entre les communautés d'Arras et de Vaugirard.

Vaugirard, 27 avril 1857

Cher Monsieur l'abbé et fils en N.S.,

M. Daviron se trouvant contraint de retourner près de vous plus tôt que nous ne le supposions, je lui remets ces lignes pour vous remercier des bonnes et affectueuses choses que vous avez la charité de m'écrire à l'occasion de mon retour. C'eût été aussi une grande joie pour moi de vous revoir après cette longue absence, et d'avoir ainsi comme un ensemble de la famille autour de moi. Mais je sais les liens qui vous retiennent à Arras et les charges que le Seigneur vous y a données. je me porte donc de cœur vers vous, en attendant que la saison meilleure et mes forces un peu remises me permettent de vous rendre visite.

Nos jeunes frères sont arrivés à bon port et font leur retraite en excellentes dispositions. Le Père qui nous la donne a l'esprit élevé, beaucoup de piété et de zèle, j'espère que sa parole va vivifier nos cœurs. le f. de Lauriston, que nous appelons le f. Georges, va bien, j'ai la confiance que le Seigneur daignera consommer l'œuvre qu'il a commencée en lui.

Je suis profondément peiné que les ff. Carment et Thuillier vous donnent si peu de satisfaction. je sens bien qu'ils sont loin de répondre à vos besoins et au vœu de nos cœurs qui serait de consommer pleinement notre union par l'échange des sujets. je comprends aussi, comme vous, qu'il vous eût fallu de la maison de Vaugirard un frère bien formé, capable de vous seconder et de répandre à Arras l'esprit et les usages de la Maison-Mère. Mais ce frère nous ne l'avons pas présentement; je ne pourrais vous l'envoyer qu'en mettant en souffrance d'autres services, non moins impérieux, qu'il faudrait désorganiser. M. Daviron a vu lui-même notre bonne volonté et notre défaut de ressources. Je ne puis donc, cher Monsieur l'abbé, que vous inviter à tirer le meilleur parti possible de vos moyens actuels, en joignant à votre personnel le f. Bassery que nous dirigerons vers Arras après la retraite. Je le crois maintenant bien assis dans sa vocation; je pense qu'avec le f. Loquet qui, je l'espère, va se remettre, le f. Michel qui peut vous rester, si vous le trouvez nécessaire, et enfin avec les ff. Cousin et les autres jeunes frères, vous pourrez organiser vos services pour cet été. A l'hiver, nous verrons si nous avons d'autres moyens.

Nous garderons ici le f. Thuillier, puisque vous croyez n'en pouvoir tirer bon parti pour votre cordonnerie. Quant au f. Carment, je vous prie de m'écrire de suite votre sentiment définitif, afin que nous ne le renvoyions point si vous pensez qu'il fasse difficilement le bien à Arras. Nous ne voulons des deux parts que le gloire de Dieu. je crois pouvoir vous assurer que le parti auquel vous vous arrêterez, quel qu'il soit, ne nous donnera nulle contrariété et ne changera rien à nos dispositions. Il serait regrettable, sans doute, que nous retrouvions, à certains égards, presque au point de départ; mais, si notre volonté d'être vraiment unis demeure ferme, le bon Maître viendra un peu plus tard à notre aide pour consommer, dans de meilleures conditions, ce que nous n'aurons pu que commencer présentement. Je prierai Dieu avec vous, afin qu'Il vous éclaire dans votre décision, et je l'accepterai, quelle qu'elle soit, comme venant de Lui. je vous prie de nouveau de me le dire à temps pour que nous réglions la position du f. Carment, dans l'un ou l'autre sens.

Tous nos frères prient, durant la retraite, pour leurs frères absents. J'espère que vous aurez pu passer ces jours difficiles sans trop de fatigues et j'apprendrai avec joie que votre santé, déjà un peu fatiguée, n'en a point souffert. J'écrirai, dès que je le pourrai, au f. Loquet que je remercie affectueusement de son bon souvenir.

Adieu, bien cher Monsieur l'abbé. Croyez bien à tous les sentiments respectueux et dévoués de

Votre ami et Père en N.S.

Le Prevost