567  à M. Halluin

En ce qui touche à l'avenir de l'œuvre d'Arras, n'alarmer ni les patronnés, ni les bienfaiteurs. Succès de la fête des Vacances à Vaugirard; mais les inconvénients excédant les avantages, il faudra désormais y renoncer.

Vaugirard, 1^er septembre 1858

Cher Monsieur l'abbé et fils en N.S.,

Un peu de fatigue résultant de notre fête de dimanche dernier et une sortie que nous avons dû faire hier m'ont empêché de répondre plus tôt à la lettre de vous que j'ai trouvée à mon arrivée. J'espère que vous aurez pressenti la cause de ce retard et ne m'en aurez point su mauvais gré. Je ne pourrai, même aujourd'hui, vous écrire plus longtemps incertain sur quelques points qui demandaient solution.

Notre bon abbé Lantiez faisant la réouverture de ses classes ne peut, avant le milieu de la semaine prochaine, se rendre auprès de vous. Il le fera à ce moment de grand cœur, afin que vous puisiez aller quelques jours vous reposer dans votre famille et venir ensuite, s'il y a lieu, prendre un peu de délassement au milieu de nous. Vous jugerez s'il vous faut profiter de ce moment pour faire un peu de retraite, ou si vous devez en choisir un autre.

J'entre bien dans les vues que vous me communiquez touchant les ménagements à prendre dans l'intérêt de votre œuvre. Je pense comme vous qu'on ne doit alarmer ni les enfants, ni les personnes qui s'intéressent à l'œuvre. Il n'est pas dans nos habitudes de rien risquer qui puisse sembler téméraire. Nous irons avec mesure et selon les indices que le Seigneur nous donnera.

Vous examinerez la question de vos classes avec notre f. Lantiez qui, au retour, nous dira ce qui lui paraîtrait le mieux.

Je suis bien aise que vous ayez parlé un peu plus nettement à M^gr. Je crois que c'était une mesure vraiment désirable.

Nous allons assez bien ici. Notre fête des vacances, très lourde affaire pour nous, s'est passée à merveille et avec une protection sensible de la S^te Vierge à qui nous l'avons dédiée, en affectant le produit des billets d'entrée au paiement de notre petite chapelle de N.D. de la Salette. Nous avions de 5 à 6.000 personnes. Tout s'est passé sans accident, au contentement général. Nous sommes néanmoins effrayés nous-mêmes de l'énormité d'une pareille entreprise, des proportions qu'elle a prises, des efforts et travaux qu'elle entraîne, nous renonçons donc à la faire désormais. Les frais excéderont 1.000f. Le bénéfice net sera de 2.000f environ, mais c'est peu en comparaison du grand mouvement et de la dépense de forces que cela exige. Il y a bien un certain effet moral qui peut être mis en compte, mais en somme la peine et les travaux excèdent les avantages.

Je suis heureux que votre fête d'Arras se soit aussi passée sans grave peine pour vous, c'est une rude épreuve pour vos enfants. J'espère que le Seigneur les rendra forts et les prémunira contre de tels dangers. Nous pensons bien aussi à la petite communauté d'Arras, nous ferons tout ce que nous pourrons pour établir de bons et affectueux rapports avec elle. Nous vous embrassons tous bien cordialement.

Votre respectueux ami et Père en N.S. et en M.

Le Prevost