589  aux Frères d'Arras

Souhaits de nouvel an. Acceptation généreuse des jours d'épreuve. Avoir le désir du ciel. Exhortation à la pratique des vertus de notre état de vie. abnégation au service du Seigneur pour qu'Il nous donne le prix en grâces et bénédictions annonce de l'entrée de l'abbé Leleu à Vaugirard.

Vaugirard, 1^er janvier 1859

Bien chers enfants en N.S.,

Quoique bien affairé aujourd'hui et assez souffrant, je coupe à travers tout quelques instants pour vous dire quelques mots de tendre affection à l'occasion du nouvel an. Je vous remercie, chers bons amis, de vos souhaits de fête de S^t Jean et de bonne année. A mesure que je vieillis, je deviens plus facile à émouvoir, et je sens de plus en plus combien sont doux les liens de la famille chrétienne. C'est une vraie privation de ne pas vous avoir tous autour de moi en ce moment; et, au milieu des embrassements si tendres de tous mes enfants d'ici, je n'en cherchais pas moins des yeux tous ceux qui étaient absents. J'offre cette privation au Seigneur comme un témoignage de l'abnégation que nous devons apporter à son service et je le conjure de vous donner le prix en grâces et bénédictions, aussi bien que de tout ce qu'il lui plaira de m'envoyer de travaux, de difficultés et de peines. Je souhaite que tout tourne à bien et à faveurs pour vous, bien chers amis. Puissé-je aussi alléger un peu vos fardeaux, mais pas trop pourtant, car ne faut-il pas qu'à l'exemple du Sauveur, nous arrivions ainsi à la gloire. Que cette douce et consolante pensée vous soutienne, bien chers enfants, quand le poids du jour vous semble un peu lourd, qu'elle vous affermisse dans les heures de langueur et de tentation. Levons ensemble les yeux au Ciel, n'est-il pas bien beau, bien resplendissant, ne nous sera-t-il pas bien doux de nous y reposer ensemble tous aux pieds du divin Seigneur, tout près de la T. S^te Vierge notre Mère, dans la compagnie des anges et des saints? Acceptons donc généreusement quelques jours d'épreuve, faisons quelques efforts pour réprimer tout ce qui peut en nous déplaire à Dieu, gardons à tout prix la charité entre nous, ayons quelque zèle pour protéger, par notre vigilance et notre dévouement, les pauvres enfants dont nous pouvons sauver les âmes. Si nous avons une vraie et chrétienne sollicitude pour eux, à cette condition, bien chers amis, nous serons dignes de la noble et sainte vocation que le Seigneur nous a donnée, nous aurons passé cette courte vie en faisant le bien, et nous serons récompensés divinement dans le sein de Dieu.

Notre bon p. Halluin vous a dit, sans doute, que nous avons l'espoir fondé d'avoir un f. ecclésiastique de plus, M. l'abbé Leleu, un de nos anciens amis des œuvres de charité; c'est un prêtre très saint. Il a été ordonné à Noël, il a dit la messe chez nous le jour de S^t Jean. Priez pour lui et pour un frère laïc [Charles Petit]que nous attendons pour le commencement de janvier.

Adieu, amis, je vous embrasse tous en J. et M.

Votre ami et Père

Le Prevost