604  à M. Halluin

Raisons invoquées pour autoriser le frère Vasseur à venir se reposer à la Maison-Mère. S'efforcer de ne pas s'absenter des fêtes de communauté. Désir de former des apprentis jardiniers à Vaugirard. constructions pour l'orphelinat: conditions ordinairement dispendieuses de telles fondations.

Vaugirard, 17 mars 1859

Cher Monsieur l'abbé et fils en N.S.,

Notre retraite aura lieu définitivement à partir du dimanche au soir, 3 avril, jusqu'au vendredi matin, 8 du même mois. Ces dispositions ont été réglées par notre petit Conseil, hier. Elle sera donnée par le r.p. Renaud, homme également pieux et expérimenté. Nous y verrons avec plaisir le f. Thuillier que vous vous proposez de nous envoyer. Quand au f. Vasseur, vous jugerez s'il est bon qu'il vienne, soit avant, soit après, prendre deux ou trois jours de repos et se recueillir un peu. Il n'y a pas, certainement, nécessité positive à ce voyage, mais il peut être considéré comme une de ces condescendances paternelles que la charité peut conseiller, en communauté comme partout. Je laisse la chose tout à fait à votre décision, cher Monsieur l'abbé, et trouverai très bien ce que vous croirez devoir régler. Je ne croirais pas commode pour vous de les envoyer tous les deux ensemble à la retraite, car ce serait vous dégarnir beaucoup et vous obliger peut-être à faire venir quelqu'un du dehors pour vous aider, ce qui a toujours quelque inconvénient. Si vous étiez définitivement d'avis d'envoyer le f. Vasseur, il pourrait peut-être venir samedi prochain, une partie de nos frères devant se réunir pour la fête de S^t Joseph. Si, du reste, cette fête se fait aussi à Arras et que vous préfériez l'envoyer la semaine suivante, tout serait également bien. Je n'ai, à cet égard, aucune raison précise de rien déterminer. Encore une fois, cher Monsieur l'abbé, je vous laisse juge de ce qui sera le mieux.

Le f. Joseph [Loquet] désire que le f. Thuillier lui apporte 6 petites houlettes avec 4 bêches pour faire travailler nos enfants. Plusieurs d'entre eux commencent à aller passablement à la culture. Je crois que, si on s'y mettait sérieusement, on pourrait de ce côté, plus sûrement encore que des autres, tirer quelque résultat du travail. Je pense que vous avez bien fait, de votre côté, de prendre un jardinier sachant son état et pouvant bien conduire vos enfants. Nos frères, ici, sont faiblement capables sous ce rapport. Le f. Joseph y aurait assez de goût, mais il n'est pas assez fort et ne peut apporter aux choses qu'il fait la suite et l'activité que toute entreprise demande.

Nous allons être obligés de faire un bâtiment au printemps. C'est une triste nécessité car, en ce moment, les constructions sont ruineuses à Paris; mais c'est là le sort des fondations, elles se font presque toujours dans des conditions dispendieuses. Nous ne voyons pas moyen, pour nous, de nous y soustraire. De votre côté, vous avez dû beaucoup faire et refaire, sans arriver pleinement aux résultats satisfaisants que vous auriez en vue. Je crois que le bon Dieu nous mène ainsi pour nous tenir dans la pauvreté et nous empêcher de nous mettre trop à l'aise. Il veut aussi exercer nos forces dans le travail qui entre essentiellement dans ses desseins sur nous. Consolons-nous donc, cher Monsieur l'abbé, de nos peines, de nos soins, de nos difficultés; c'est au milieu de tout cela que se consomme l'œuvre intérieure de notre sanctification, et c'est à ce prix aussi que s'achètent les fruits de salut que produisent nos œuvres.

Tous nos frères vous sont tendrement unis en N.S. Je me joins à eux pour vous assurer de notre respectueuse et cordiale affection.

Votre ami et Père en J. et M.

Le Prevost