Voyage à Amiens différé. C'est M. Myionnet qui se
déplacera. Nouvelles de Vaugirard.
Vaugirard, 3
juillet 1859
Bien cher ami
et fils en N.S.,
Votre bonne lettre m'arrive à temps avant le départ de
nos frères, M. l'abbé Faÿ et M. Myionnet, qui vont vous rendre visite demain et
qui de là se rendront aussi près de notre bon abbé Halluin.
Les termes si affectueux de votre lettre me font encore
plus vivement regretter de ne pouvoir cette fois vous aller voir moi-même, mais
ce ne sera, je l'espère, qu'une satisfaction différée. L'extrême chaleur
serait, je pense au dessus de mes forces pour un voyage entrepris en ce moment
et ne me laisserait guère les moyens de rendre ma visite un peu utile et
encourageante pour nos frères. Nous avons d'ailleurs surcroît d'activité à la
maison ces temps-ci, à cause d'une construction assez considérable que nous
faisons et dont la surveillance absorbe beaucoup M. Lantiez.
La lettre de notre f. Jules [Marcaire] m'a beaucoup
consolé en ce qui le concerne; je vois avec joie qu'il a tout à fait surmonté
ses dispositions mélancoliques, qu'il prend sérieusement à cœur les intérêts de
son œuvre et qu'il s'asseoit plus résolument dans la position qu'il doit
prendre comme votre remplaçant. Le long temps qui s'était écoulé sans qu'il
m'écrivît me laissait quelque inquiétude sur son état d'esprit, je suis tout
heureux de le voir en bonne disposition. Sa mère m'a demandé à l'aller voir,
mais assez faiblement et sans insistance; si nous pouvons l'éviter, ce serait
bien mieux; je préférerais, si cela semblait nécessaire, qu'il fît lui-même
dans deux ou trois mois une petite apparition ici, ce serait moins dérangeant
et moins irrégulier. Vous pourrez en causer avec M. Myionnet comme de tout le
reste; vous savez que ce bon frère est d'un excellent esprit et que vous pouvez
vous entendre avec lui comme avec moi-même, c'est ce qui me console de ne point
vous visiter personnellement. Quant au f. Joseph [Loquet], on en peu tirer plus
de parti que vous ne semblez le croire; il faut le prendre par l'affection et
la confiance, il a besoin d'être relevé et soutenu, le blâme répété trop
souvent le porterait au découragement. Je pourrais difficilement le remplacer
présentement. M. Henry Guillot se trouve définitivement beaucoup mieux pour sa
santé de l'air de Vaugirard; d'ailleurs, l'envoi de M. Ernest [Vasseur] à
Nazareth, la conscription du jeune Verdier, etc. nous ont mis un peu à
l'étroit, nous n'avons strictement que le personnel nécessaire pour nos
nombreux services à Vaugirard. Prenons donc un peu de patience, cher ami, avec
l'aide de Dieu, qui ne nous manque jamais, nous arriverons à tout asseoir en
bonnes conditions.
Votre ami et Père
Le Prevost
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