802  à M. Caille

User de charité avec un frère. Mesure de police contre les Confrères. Surveillance exercée vis-à-vis de la Congrégation.

Vaugirard, 16 novembre 1861

            Bien cher ami et fils en N.S.,

            J'ai tardé quelques jours à répondre à votre dernière lettre pensant que notre f. Alphonse [Vasseur] allait m'écrire, ainsi que vous me l'avez dit; je n'ai rien reçu qui vînt de lui, j'ai donc lieu de penser que le calme et la réflexion l'auront, comme il lui arrive ordinairement, remis en meilleures dispositions. Je suis persuadé que vous faites tout avec lui, comme avec tous, dans un esprit de conciliation et de charité; ayons confiance, sa foi qui est sincère et les appuis spirituels qui lui sont abondamment accordés le soutiendront et, mieux encore, l'établiront enfin dans une véritable abnégation.

            M. Planchat, dont je reçois ce matin quelques lignes, me dit que, en ensemble, tout va et promet de bien marcher.

            Vous savez les tribulations de la Société de S^t-Vincent de Paul; on gémit en voyant une institution, si inoffensive et noble dans ses actes, méconnue et tristement entravée; on ne sait qu'attendre de l'avenir pour tout ce qui tient à la foi et à la charité. Nous avons, de notre côté, été l'objet de surveillances et inquisitions³²⁸ jusqu'ici inusitées pour nous; l'orphelinat de Vaugirard est maintenant soumis aux inspections de l'Université, etc. Nous pensons toutefois que, quant à présent, il n'y aura pas grand inconvénient à ces dispositions; mais la police s'est visiblement occupée et inquiétée à notre sujet; nous n'en prenons point de souci, n'ayant jamais rien fait qui ne pût être mis au jour.

            En tout cela néanmoins et en d'autres faits, on sent que l'Eglise est gravement en épreuve, tâchons de nous conformer aux vues de Dieu et de tourner à bien tout ce qui nous peut arriver de contristant et de pénible.

            Adieu, bien cher ami, assurez tous nos frères de ma tendre affection, et croyez en particulier à tout mon cordial dévouement en J. et M.

                                                                                             Le Prevost

            P. S. J'apprends avec plaisir que les règlements des ff. ont été modifiés par vous; le f. Alphonse [Vasseur], au moment de la retraite, m'avait dit qu'il avait trop de temps de libre, je crois que l'occupation ne lui eût pas manqué en réalité, s'il l'avait cherchée sérieusement, mais ses travaux étaient trop laissés à son libre arbitre; plus de précision est une amélioration pour lui comme pour les autres.