880  à M. de Varax

Remerciement pour sa lettre "trop affectueuse" envoyée par M. de Varax (alors candidat au Noviciat qu'il commencera à Chaville le 7 avril). MLP. a été remué par son âme jeune et ardente, une de celles qui "sans résister quittent tout pour suivre le divin Jésus."

Vaugirard, 15 janvier 1863

            Bien cher enfant en N.S.,

            Je n'ai pas le courage de vous gronder pour la lettre trop affectueuse que vous m'avez écrite hier; c'est une effusion d'un cœur touché par la grâce, comment arrêter cela? L'Esprit souffle où il veut et comme il veut, j'en ai été, en lisant cette lettre, remué comme si j'avais 20 ans; oui, Dieu est bon, mais comme Il est puissant aussi, comme Il sait, quand Il s'empare d'un cœur, y mettre une surabondance d'amour qui embellit tout et prête vie et beauté à tout! Ces heures de saint enthousiasme pourront et devront certainement passer, mais je n'ai pas peur, la touche est donnée maintenant, l'impulsion est reçue, vous serez tout à Dieu, dans la voie la plus humble, la plus généreuse, dans la voie du sacrifice; il faut bien que la tradition s'en perpétue et que le divin Jésus trouve toujours des âmes auxquelles Il dise avec autorité: Suivez-moi et qui, sans résister, quittent tout pour le suivre; vous êtes, cher enfant, une de ces âmes, bénissez-le, car c'est une grâce, c'est-à-dire un don gratuit; gratuit, oui, et pourtant don qui ne tombe qu'aux cœurs ayant place pour le recevoir et l'apprécier.

            Adieu, cher enfant, je ne veux pas prendre votre temps, il faut que vous travailliez pour bien et vite finir. Vous entendez; adieu donc, je brûlerai votre lettre quand j'aurai un sacrifice à faire à Dieu, je la garde aujourd'hui.

            Votre affectionné ami et Père en J. et M.

                                                                                             Le Prevost