986-1  à M^gr Angebault

Précisions sur le projet de fondation à Angers. M. d'Arbois pressenti comme supérieur de la nouvelle communauté.

Vaugirard, 11 mars 1865

            Toutes les fois qu'il s'agit sérieusement pour nous de quelque entreprise nouvelle, le désir du bien, je l'espère, et peut-être un certain besoin de faire acte de vie nous poussent à nous porter en avant; mais, quand nous arrivons à l'examen de nos ressources, nous sommes arrêtés par notre faiblesse et notre impuissance. C'est ce qui est arrivé encore dans la circonstance présente en suite de la proposition que votre paternelle bonté nous a faite de prendre quelque part aux bonnes œuvres de votre diocèse. Cependant, Monseigneur, comme nous avions ici tant de raisons de vous donner une marque de notre déférence et de notre tendre reconnaissance, nous avons tenté tous les moyens et nous arrivons, non sans peine, à une combinaison qui semble pouvoir répondre aux exigences des œuvres que vous consentiriez à nous confier. Il reste bien pour nous quelques difficultés à aplanir, mais je vous les soumettrai, Monseigneur, et votre prudence en sera juge.

            Je me propose de partir pour Angers au commencement de la semaine, mardi je pense, afin de m'entretenir directement avec vous de l'importante affaire qui nous occupe. J'aurai l'honneur de vous présenter M. l'abbé d'Arbois de Jubainville, actuellement aumônier de notre maison des jeunes ouvriers de Nazareth, lequel me semblerait propre à remplir les emplois que vous nous destinez. Il n'a que 28 ans, mais il a de la maturité, un sens très droit, des talents et une culture d'esprit très convenables, une piété et une vertu peu communes. J'espère qu'aidé de vos conseils, soutenu par votre bienveillance, il ferait sans tapage, mais doucement et sûrement, sa place dans les œuvres qu'il aurait à diriger.

            Je n'ai pas besoin de vous dire, Monseigneur, qu'il n'est point de lieu où il nous soit plus attrayant de nous établir que celui où nous serons sous votre juridiction. Nous nous écrierons assurément, comme en l'évangile de demain: Seigneur, nous sommes bien ici, faisons-y trois tentes³⁶⁹; je n'ai quant à moi qu'un regret, c'est qu'aucune de ces tentes ne sera pour moi; mais comment me plaindrais-je puisque mes enfants y seront, et puisque je vais moi-même vous rendre visite dans quelques jours et solliciter une fois encore vos conseils, vos encouragements et votre paternelle bénédiction.

            Je suis, Monseigneur, dans cette attente, avec un profond et tendre respect

            Votre humble serviteur et fils en N.S.

                                                                                             Le Prevost

                                                                                             P^tre