Ne pas s'ingénier à se tourmenter. Ne pas s'étonner si
les gens du monde ne s'élèvent guère jusqu'au surnaturel.
Espérances fondées sur les dix scolastiques qui se préparent au sacerdoce.
Vaugirard, 21
décembre 1865
Bien cher enfant en N.S.,
Notre cher M. Magnien va vous rejoindre à Arras; j'espère que ce sera pour vous
tous un nouveau sujet de bénir le bon Dieu qui se compose chez vous une petite
famille qui lui sera toute dévouée et qui sera cordialement unie dans sa divine
charité.
Je m'étonne, cher enfant, qu'avec tant de raisons d'admirer la conduite si
miséricordieuse de la
Providence à votre égard, vous soyez inquiet et ingénieux à
vous tourmenter.
Que pouviez-vous souhaiter de mieux proportionné à vos aptitudes et à vos
besoins que ce que Dieu a fait? Craignons de n'être pas assez reconnaissants
envers Lui. Vous demandez, du côté de votre famille, plus qu'elle ne peut vous
accorder, dans l'esprit et le degré de lumières spirituelles où elle est.
Comment des gens du monde, préoccupés avant tout du matériel et du positif de
la vie, pourraient-ils s'élever jusqu'au surnaturel, jusqu'à l'intelligence
d'une vocation et du domaine souverain que Dieu a sur nous? Prions pour eux,
sinon pour leur obtenir une pareille intelligence, que sans doute Il ne leur
demande pas, au moins pour qu'Il leur donne autant de foi et de charité qu'il
leur en faut pour opérer leur salut. Cela fait, soyons en paix, sans solliciter
avec anxiété des sympathies dont nous pouvons nous passer, si nous savons
chercher en Dieu notre part et notre consolation.
Considérez avec reconnaissance quelle aimable génération de bons prêtres le
Seigneur prépare en ce moment à notre petite famille; vous voilà 10 maintenant
au seuil du sanctuaire [MM. de Varax, Chaverot, Baumert, Trousseau, Leclerc,
Pattinote, Boiry, A. Lainé, Magnien, Camus]; puissent tous les 10 rester
fidèles à leur vocation, à Dieu qui les veut pour ministres, aux pauvres
ouvriers qui attendent d'eux leur lumière et leur consolation, à notre petite
famille qu'ils doivent grossir et fortifier.
Adieu, cher enfant, je demande à Dieu pour vous, pour votre maison et pour vos
œuvres, toutes les bénédictions que sa tendresse de Père sait trouver pour ses
enfants.
Votre ami et Père
Le Prevost
J'ai chargé M. Magnien de vous embrasser, ainsi que notre cher tonsuré Adolphe
[Lainé]. Tonsurandus non tonsuratus.
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