Conseils pour lutter contre le découragement et la
fatigue.
Vaugirard, 15
janvier 1867
Mon bien cher enfant en N.S.,
Je sens bien vivement les difficultés que vous créent tout ensemble l'état de
votre santé, l'irrégularité de vos études et, en outre, la préoccupation des
soins du patronage dont vous êtes contraint de vous charger, malgré tous ces
ennuis. Je vous invite à prendre, pour votre santé, autant de précautions que
la situation le permettra; je prierai, comme je l'ai fait déjà, le bon Maître de
vous donner soulagement et j'espère qu'Il daignera se rendre à nos vœux. On
peut penser que la saison rigoureuse vous aura causé quelque refroidissement
qui aura renouvelé vos douleurs nerveuses, mais quelque repos et l'attention un
peu soutenue à préserver du froid les parties endolories vous suffiront, comme
c'est ordinaire, à dissiper ce malaise si incommode.
Pour les fatigues que vous cause le patronage, j'ai été le premier à y penser
et je m'occupais de vous envoyer un de nos frères assez expérimenté dans cette
œuvre, bien que ce ne fût pas sans un grand détriment pour nous ici; mais la Providence, qui veut
sans doute nous mettre à l'épreuve, nous a envoyé une double contrariété: celui
que je voulais vous envoyer [M. Charrin] a été pris d'un rhume fatigant qui le
retient presque constamment à l'infirmerie, et celui qui devait le remplacer
s'est en même temps donné une entorse qui l'empêche absolument de marcher. Ces
malaises ou dérangements seront momentanés sans doute, mais ils m'ont mis dans
l'impossibilité absolue de vous porter secours aussi vite que je l'aurais
voulu. J'ai la confiance que bientôt ces deux éclopés seront sur pied et que
l'un d'eux pourra se rendre près de vous.
Ayons confiance; M. de Varax me dit que vous souffrez patiemment, je vous en
félicite bien; en nous conformant à la volonté de Dieu, nous sommes agréables à
ses yeux, nous épargnons à nos frères la peine que cause une humeur chagrine et
nous attirons du Ciel la grâce qui doit mettre fin à nos maux.
Vous pourriez écrire à M. des Francs en le priant de vous donner des nouvelles
de votre famille; tout va bien sans doute, puisqu'on ne vous en écrit rien.
Aimez Dieu plus que tout, offrez-Lui tout, Il vous rendra tout.
Adieu, mon bien cher enfant, faites pour moi bien des amitiés à nos frères et
croyez vous-même à ma tendre affection en N.S.
Votre ami et Père
Le Prevost
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