1594  à M. Maignen

MLP. ne croit pas qu'il faille laisser s'établir M. de Varax parmi les gardes mobiles, délaissant pour cela l'œuvre de Nazareth dont il est chargé. Avis sollicité.

Vaugirard, 9 octobre 1870

            Mon cher enfant en N.S.,

            Je vous prie de lire la lettre ci-jointe et de me la retourner avec votre avis, par le porteur.

            M. de Varax, poussé par un zèle louable en soi, mais qui est à régler, insiste pour aller s'établir au milieu des gardes mobiles du 6^e bataillon, posté en dehors de Paris, à Bagatelle, afin de leur servir d'aumônier; il y est particulièrement attiré parce que quelques-uns des jeunes gens du patronage ou du Cercle (en très petit nombre) font partie de ce bataillon.

            Ma pensée est toujours que le devoir de M. de Varax est de rester à son poste à Nazareth, où la plupart des jeunes gens et enfants de l'œuvre viennent fidèlement et qui, comme maison régulièrement posée, donne un peu exemple et courage aux autres pour demeurer fermes à nos œuvres, afin qu'elles demeurent des foyers protecteurs où nos enfants sont sûrs de trouver, maintenant et après l'orage, un asile toujours ouvert.

            M. de Varax se tranquillise parce qu'un curé du Raincy, réfugié à Paris, un peu timide paraît-il et peu fait aux allures de nos œuvres, le remplacerait à Nazareth durant la semaine et les dimanches aussi, quand les communications avec Paris seraient faciles, et après sans doute que le service de Bagatelle, devenu le principal pour lui, lui laisserait liberté suffisante.

            Il ne me semble pas que M. de Varax doive, ici, suivre son attrait, mêlé, à son insu, d'un peu d'esprit d'aventure, fort naturel aux jeunes gens et utile peut-être aux hommes de grand zèle.

            Mais j'ai peur que, de mon côté, un peu de timidité de vieillard et de prudence trop exclusive ne m'inclinent à veiller plus qu'il n'est opportun au salut de nos œuvres; je vous prie donc de me dire, vous qui savez mieux que moi les besoins de Nazareth et des autres patronages, ce que vous croiriez devoir conseiller.

            Pour moi, j'autoriserais une visite ou deux dans la semaine à Bagatelle, et rien de plus; Nazareth en souffrirait déjà beaucoup par l'attention partagée, et surtout par la préférence et l'attrait qui portent M. de Varax de l'autre côté.

            Votre tout affectionné ami et Père

                                                                              Le Prevost