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Jean-Léon Le Prevost Lettres IntraText CT - Lecture du Texte |
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128 à M. MaignenMLP. souffre de voir sa mère à toute extrémité, elle dont "la vie ne fut que travaux, sacrifices et dévouement". Il reste uni à ses frères de Paris.
Duclair, 12 novembre 1845 Mon bien cher confrère, Mon départ a été si précipité que je n'ai pu avertir personne, sauf le f. Myionnet et M. Dufresne à qui j'ai écrit deux mots, en hâte, pour lui remettre la conduite de nos petites œuvres. Il en était d'autres encore, vous le savez bien, que j'eusse aimé à prévenir, mais le temps m'a manqué, je ne pouvais, d'après la lettre que j'avais reçue, mettre aucun retard. Le médecin qui n'avait d'abord pas vu de danger imminent dans l'état de ma pauvre mère et qui avait promis d'avertir si la situation empirait avait, dimanche, déclaré que la fièvre était violente, que tous les symptômes devenaient plus graves et qu'il était temps de m'appeler; ma sœur m'écrivait donc que si je voulais revoir notre bonne mère, il fallait accourir; vous comprenez, cher confrère, quelle diligence j'ai dû mettre à mes dispositions de départ; deux heures après la réception de la lettre, j'étais sur le chemin et le soir, à 6h.½, j'étais près de ma mère. A mon arrivée la fièvre avait diminué, et j'ai pu en m'approchant doucement, voir notre pauvre malade qui reposait assez paisiblement. Depuis lors elle est restée dans le même état, sans qu'on ose espérer, mais sans que tout semble non plus consommé. Bien qu'elle ait été saignée après l'accident, elle a encore des forces, tant, pour son âge, sa constitution est vigoureuse; mais la paralysie de ses membres est sans amélioration et si on ne parvient à lui faire prendre quelque peu de nourriture, elle va s'épuiser entièrement. Jusqu'à présent elle n'a de goût à rien, et, c'est à grand peine si, à l'aide d'un chalumeau, on fait passer dans son gosier quelques gouttes de boissons rafraîchissantes. Je ne la quitte presque pas et je partage avec ma sœur et sa fille les soins continuels qu'un état si pénible demande. Vous avez fait dans votre maison une trop longue épreuve d'une affliction presque semblable pour que j'aie rien, cher ami, à vous apprendre à ce sujet, je ne m'en faisais pas pour moi une idée assez exacte et j'apprécie mieux encore maintenant les soins et le dévouement dont vous avez entouré votre pauvre père. Une grande consolation toutefois nous est laissée, c'est que notre chère malade a gardé toute se présence d'esprit et que son cœur n'a point souffert de l'affaiblissement du corps. Le matin, elle me fait mettre à genoux près de son lit et, pendant que je récite la prière à haute voix elle la suit et la répète même avec moi; le soir, je remplis le même devoir avec une grande douceur pour elle. Dans la journée je lui fais une lecture de piété qu'elle entend et goûte avec le même intérêt; de temps en temps, elle prie tout haut et demande à Dieu de prendre ses souffrances patiemment et en esprit de pénitence. Je n'ai pas besoin de vous dire cher ami, combien de pareils dispositions m'édifient et me consolent; elles sont le fruit d'une longue vie de travaux, de sacrifices et de continuels dévouements; ma bonne mère ne s'est jamais recherchée en rien, elle ne pensait qu'à faire le bien, à être utile aux autres, à employer son temps pour quelque bonne fin, et surtout à glorifier Dieu qu'elle servait avec une admiration simplicité. Je ne saurais vous dire si mon absence se prolongera beaucoup; cela dépend entièrement de la marche que va suivre la maladie de notre bonne mère; s'il plaît à Dieu de la rappeler à Lui, je ne voudrais pas la laisser ni abandonner ma sœur dans un pareil moment; si, au contraire, la bonne constitution de notre chère malade prolonge encore son existence, je voudrais avant mon départ la voir un peu remise et hors de danger. J'attends, et remets toutes choses aux mains sages et paternelles de notre divin Seigneur. Au milieu de mes peines et de mes inquiétudes, cher ami, je ne laisse pas d'avoir de tendres souvenirs pour ceux que j'ai quittés et pour vous plus que pour les autres; je pense à vous le matin à la Ste Messe et en beaucoup d'autres temps encore; pensez aussi à moi, à ma pauvre mère surtout et gardez-moi cette douce et tendre affection que vous me savez si nécessaire. Ecrivez-moi bientôt donnez-moi des nouvelles de nos amis et de nos petites œuvres qui ne resteront pas en souffrance, je l'espère, soutenues qu'elles seront par le zèle et la charité de nos confrères. Veillez-y en particulier, voyez avec MM. Boutron, Dufresne et Taillandier138 si tout va bien, si nos malades en particulier et les catéchismes du soir ne sont pas abandonnés. Allez voir aussi le f. Myionnet qui se trouve délaissé et que je recommande à votre fraternelle affection. Adieu, cher ami, je m'unis à vous dans les cœurs de J. et de M. Le Prevost
Présentez mon respect à votre bonne mère.
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138 Confrères de St-Vt-de-Paul. - Henri Taillandier (1821-1889), alors membre de la conférence St-Sulpice, plus tard prêtre et curé de Saint-Augustin à Paris, resta toute sa vie un grand ami de MLP. Se remémorant l'année 1845-46 avec MLP., il écrira : "Cette année passée auprès de ce doux et évangélique docteur qui me servait de guide en toutes choses, peut équivaloir au grade de bachelier en bonnes oeuvres". (Un homme de bien, M. de Montrond, p.42). Ses parents furent parmi les insignes bienfaiteurs de la Communauté naissante.
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