615  à M. Halluin

Demande de placement en apprentissage d'un jeune orphelin.

Vaugirard 1^er mai 1859

Cher Monsieur l'abbé et fils en N.S.,

L'un de nos enfants, nommé Léon Maillard, tout à fait orphelin, est au moment d'être placé en apprentissage; il a 14 ans. Ses protecteurs désirent qu'il soit mis hors de Paris, afin d'éviter qu'il se rapproche habituellement d'une famille où il a passé sa première enfance, mais dans laquelle il n'aurait ni bons exemples, ni appuis pour se bien conduire. Nous avons pensé vous l'envoyer, persuadés que, placé par vous et restant sous vos yeux, il persévérerait dans ses bons sentiments. Ses protecteurs vous pourraient payer 200f pour sa pension. Il est vif et un peu pétulant, mais très bon enfant et d'un cœur excellent; en le prenant de ce côté, on en fait tout ce qu'on veut. M. Lantiez désirerait le garder comme persévérant, l'ayant depuis longtemps déjà sous sa conduite, et s'étant fort affectionné à lui. Mais notre enfant a trop d'activité pour se plaire à la vie sédentaire et renfermée, il désire l'air libre des ateliers. Je ne crois pas qu'il y prenne le mauvais chemin, il y a beaucoup de bon en lui et des sentiments de foi sincères. Il a une misère de santé assez incommode; il laisse parfois la nuit aller ses urines. Avec un peu de précaution, nous parions à cet inconvénient. Les années et la force lui venant d'ailleurs, j'espère que cette petite infirmité va diminuer et cesser. Depuis plusieurs jours, je voulais vous écrire à son sujet et vous le proposer, afin qu'il pût partir avec notre bon abbé Hello. Soit oubli, soit presse pour d'autres occupations, je me trouve assez en retard pour que votre réponse ne puisse guère nous arriver avant le départ du bon abbé Hello. Je crois néanmoins que je profiterai de cette occasion pour envoyer notre enfant, parce qu'en aucune façon, je ne crois pas que vous ayez à vous plaindre de lui. N'ayant pas de parents, il est très disposé à s'affectionner à ceux qui lui donnent des soins, je crois pouvoir répondre qu'il vous regardera comme son père et vous donnera satisfaction par son respect et sa soumission.

Tout marche ici autour de nous selon l'usage, le Seigneur daigne bénir nos humbles travaux. Les retraites de nos patronages et saintes-Familles ont été pleines de consolation. J'espère que votre première communion sera aussi heureuse et édifiante pour votre chère maison.

Je recevrai avec plaisir des nouvelles de nos frères, du f. Jean-Baptiste [Hamon] en particulier. Je désire qu'il m'écrive un peu au long, quand il aura quelques moments.

Tout le monde ici vous assure avec moi de ses sentiments de respect et d'affection en N.S.

Le Prevost