Couverture | Index | Mots: Alphabétique - Fréquence - Inversions - Longueur - Statistiques | Aide | Bibliothèque IntraText
Jean-Léon Le Prevost
Lettres

IntraText CT - Lecture du Texte

  • Lettres 901 - 1000 (1865 - 1866)
    • 973  à M. Decaux
Précédent - Suivant

Cliquer ici pour activer les liens aux concordances

973  à M. Decaux365

Avec courtoisie mais fermeté, MLP. expose les principes nécessaires pour sauvegarder l'autorité du frère Directeur sur les enfants qui lui sont confiés; cette autorité ne saurait être contrariée par d'autres mesures en sens contraire que pourraient prendre les Confrères. De telles conditions sont appliquées depuis les fondations. MLP. ne recherche vraiment que l'union cordiale entre les deux Sociétés.

 

Vaugirard, [6] décembre 1864

            Mon bon ami,

            Vous avez témoigné le désir de savoir plus précisément quel était le but de la visite que je m'étais proposé de vous faire et que vous avez cru devoir ajourner. Je n'avais pas d'autre pensée que de vous représenter de nouveau les embarras sérieux que nous causeraient les changements que vous projetiez de faire dans la condition des frères qui dirigent les patronages. A défaut de cette entrevue, et pour prévenir des malentendus regrettables, je vous écris ces lignes dans une pensée de cordiale explication. Ainsi que je vous l'ai écrit il y a quelque temps, je désire laisser intactes l'influence et l'action de la Société de St-Vincent de Paul dans les patronages, mais il me semble que les dispositions de l'état actuel y ont pourvu suffisamment: le Conseil Général de toutes les maisons que vous présidez mensuellement, le Conseil particulier de chaque maison que tient aussi tous les mois le Président de chaque patronage, le concours zélé des Confrères, enfin les subventions que vous donnez à l'œuvre forment assurément un ensemble d'interventions bien notables; d'autant que le Président de chaque Maison, en lui attirant les appuis et les bienveillances, en aidant le Directeur par ses avis et ses observations, en vous tenant vous-même au courant de tous les mouvements de l'œuvre et de tout ce qui l'intéresse, la rattache constamment à vous et la tient vraiment en vos mains. Ces choses posées du côté de la Société, la part du Directeur, dont la tâche, vous le savez, n'est pas sans difficulté, devait être aussi réglée. Il me paraît de toute nécessité que, pour conduire et maintenir dans la discipline des réunions de 250 ou 300 enfants apprentis, durant des jours entiers et par tous les temps, le Directeur ait une autorité ferme et bien assise, qui ne soit jamais infirmée aux yeux des enfants, ni contrariée par les mesures que prendrait en sens divers une autre direction. J'ai vu, depuis nombre d'années, quelle prodigieuse énergie, quelle dépense de forces il faut faire pour assurer le maintien de l'ordre durant ces longues journées du dimanche, et je me suis convaincu qu'en ajoutant quelques difficultés de plus à cette tâche si rude, on la rendrait intolérable. Il me semble donc indispensable que le Directeur seul s'entende le dimanche avec ceux qui l'assistent dans les emplois et services de la journée, et qu'il reste libre aussi d'avoir avec eux, durant la semaine, un petit Conseil pour concerter d'avance les moyens d'exécution. Il s'agit là de simples détails d'action quotidienne dans lesquels le Président n'a point à intervenir; c'est au Directeur, chargé de la conduite des enfants et de la marche des exercices, à régler lui-même son opération; sans cela, point de ressort suffisant, point d'unité et de suite dans les mouvements, point d'ordre ni de bien réel dans la journée du dimanche. Enfin, je crois qu'on doit, comme on l'a toujours fait, laisser au Directeur la faculté de renvoyer les enfants indisciplinés ou nuisibles au bien des autres; il peut y avoir avantage à ce que ce renvoi soit considéré comme provisoire et qu'on ait à en examiner l'utilité au petit Conseil de semaine; il y a là une garantie contre l'irréflexion d'un premier mouvement; mais si, après examen et observation, le Directeur croit définitivement que le renvoi est nécessaire, on ne saurait l'obliger à garder un sujet qui brave son autorité ou qu'il sait être dangereux pour les autres. Si l'on demande où réside ainsi l'autorité, je réponds: en vous-même pour la haute direction de l'ensemble des patronages; dans le Président de chaque maison pour les dispositions générales concernant l'esprit, les règles et les intérêts de cette maison; et, enfin, dans le Directeur pour la conduite des enfants, la marche des exercices, et toutes les mesures d'exécution, soit au dedans, soit au dehors. Pour le spirituel, le domaine exclusif en revient de droit à l'aumônier.

            Ces conditions, dans leur substance principale, me paraissent si essentielles, mon bon ami, qu'il me serait absolument impossible d'en accepter d'autres, au moins pour les maisons de Nazareth et de N.D. de Grâce qui ont été suscitées et formées par notre Communauté et constamment conduites par elle; nous y entretenons plusieurs prêtres et plusieurs frères anciens et expérimentés; ils ont besoin d'un peu d'initiative et de liberté d'action pour maintenir le bien qui s'y fait heureusement. Ces dispositions ne sont, du reste, en aucune façon contraires aux traditions que vous êtes justement jaloux de conserver. Nazareth n'a eu que deux Directeurs: M. Myionnet, qui a jeté les premières assises d'une œuvre sérieuse, et M. Maignen, qui lui a donné la forme définitive; N.D. de Grâce a été également créée par ce dernier et remise ensuite à nos frères qui la dirigent actuellement; mais, dans toute cette période, qui dure depuis plus de 15 ans, les Directeurs ont constamment gardé le droit de faire eux-mêmes, avec tous ceux qui concourent ordinairement à l'œuvre, un petit Conseil de semaine pour préparer la journée du dimanche; ils ont eu aussi le privilège d'en conduire les exercices, de donner les avis habituels aux enfants, et enfin la faculté d'exclure les sujets qu'ils désespéraient d'amender. Vous le voyez, mon cher ami, s'il s'élevait, ce qu'à Dieu ne plaise, quelque triste dissentiment entre nous sur ces points, on ne saurait nous les imputer, puisque nous nous bornons à demander le maintien des conditions où nous avons toujours été placés.

            Quant aux maisons, autres que Nazareth et N.D. de Grâce, Ste-Anne, par exemple, ou d'autres où on voudrait nous appeler, je ne répugne pas, dans l'intérêt de la paix, à essayer, si vous le désirez, le régime que vous proposez et qui donnerait une place encore plus large à l'action du Président; l'on jugerait par là, dans la condition différente où sont ces maisons par rapport à nous, si l'œuvre s'ordonnerait convenablement et à la satisfaction des deux parties.

            En écrivant ces lignes, je n'ai pas voulu, comme vous le dites, mon bon ami, vous poursuivre par mes plaintes, mais vous témoigner une fois de plus combien une cordiale union entre nos deux Sociétés me semble désirable, je dirais nécessaire pour tirer de nos travaux des résultats vraiment louables, vraiment utiles à notre édification, au bien de nos patronnés et, par-dessus tout, à la gloire de Dieu.

            Je le prie de vous inspirer, ainsi qu'à nos Confrères, l'esprit de conciliation sans lequel nous n'arriverons point à cette fin.

            Je suis, comme toujours, avec un affectueux dévouement en N.S.

            Votre ami et Confrère

                                                                                             Le Prevost

 

            P. S. Je ne répète pas ici ce que je vous ai déjà dit dans une précédente lettre touchant le concours des Confrères au patronage; nous sommes convaincus comme vous qu'un des points essentiels de l'œuvre est de les y attirer et de les y intéresser, qu'il ne suffit pas qu'elle soit utile aux apprentis, qu'elle doit aussi donner aux Confrères, l'occasion d'exercer la charité; on y a toujours tendu à Nazareth, où nombre des meilleurs membres de la société y ont pris le goût de cette œuvre et ont ensuite rendu de grands services en d'autres maisons. Si, à Grenelle, nous avons été moins heureux en ces derniers temps, c'est contre notre volonté, M. le Curé ayant violemment éloigné la Conférence du patronage; nous serons heureux quand on l'en aura rapprochée et que l'aide des Confrères y redeviendra fréquente et assidue.

 

 





365 Il existe, aux ASV, un brouillon avec ratures et surcharges, qui porte la date du 6.





Précédent - Suivant

Couverture | Index | Mots: Alphabétique - Fréquence - Inversions - Longueur - Statistiques | Aide | Bibliothèque IntraText

Best viewed with any browser at 800x600 or 768x1024 on Tablet PC
IntraText® (V89) - Some rights reserved by EuloTech SRL - 1996-2008. Content in this page is licensed under a Creative Commons License