27  à M. Levassor

M. Levassor abandonne le projet d'association. Proposition d'une place de greffier. S'ils devaient se séparer, rester unis en Jésus, l'ami commun. Espérance de voir fructifier l'œuvre des Jeunes détenus. Dames assistées par la Conférence.

Paris, le 17 septembre 1834

Je ne pourrais dire avec vérité, mon cher ami, que votre lettre ne m'ait donné quelque peu de chagrin. J'avais mis mes pensées, mes espérances dans ce projet et ce n'est pas sans quelque désappointement que je vois d'un souffle le château renversé; mais, je le peux dire aussi, je n'avais désiré la réalisation de nos desseins qu'autant qu'ils seraient dans la volonté de Dieu et qu'ils se concilieraient pleinement avec vos propres désirs, avec vos devoirs, vos intérêts. Si tout cela et avant tout l'appel de Dieu vous entraînent ailleurs, que sa volonté soit faite, suivez votre voie, mon ami, et soyez assuré que mes vœux bien ardents, ma bien vive sympathie vous y accompagneront constamment. Je n'ai point écrit à M. Dufour dont j'ignore l'adresse. J'ai fait demander chez lui si une lettre n'était pas venue pour moi de sa part, mais je ne crois pas bon de la provoquer directement dans la plus qu'incertitude où votre situation met désormais nos arrangements avec lui. S'il m'écrit, selon sa promesse, je concerterais avec vous la réponse, si au contraire, ce que je ne présume pas, son avis a changé, je pense qu'il vaut mieux lui laisser l'initiative de la rupture.

M. Gardet, venu ces jours-ci chez moi où il ne m'a pas rencontré, a laissé quelques lignes pour me prier de vous faire en son nom une communication. Un greffier attaché au Tribunal de 1^ère instance à Paris offre de lui faire gagner 600f. et au-delà chaque année pour un très léger et bien facile travail; cependant M. Gardet, décidé à ne s'occuper nullement et quelque peu que ce soit de pratique, va refuser cette proposition, mais il pense qu'elle pourrait vous agréer, en ce cas, il accepterait, sauf arrangement avec vous, pour le partage du travail, s'il en peut prendre partie. Dans le cas où vos ouvertures pour Orléans n'auraient pas succès, peut-être cela serait-il à votre convenance. Je craindrais seulement, quoique M. Gardet n'ait rien ajouté sur cela, qu'il n'y eût inconvénient à trop ajourner la réponse à faire au greffier en question.

Merci, mon cher ami, du bon souvenir que vous m'accordez dans vos charmantes excursions, de la part que vous m'y voulez bien souhaiter, ma pensée a des ailes, mais mon corps a des chaînes. A défaut de l'un, je mets au moins l'autre à votre suite pour vous faire fidèle compagnie. J'aurai bien de la joie à vous revoir à votre passage ici, ce sera pour bien peu de temps, pour une longue absence ensuite, et, qui sait, peut-être pour toujours. Mon Dieu! que les liens terrestres durent peu, et qu'il nous faut bien, n'est-il pas vrai, mon ami, faire amitié, établir fraternité avec J.C. frère, ami qu'on a toujours là, qui nous suit en tous lieux et qu'on retrouve encore au monde où nous tendons. Si le temps nous sépare, nous, mon ami, puissions-nous là, du moins, nous retrouver entier avec cet ami commun.

Votre bien dévoué en J.C.

Le Prevost

M^me Delatre part ou est partie pour Rouen, vous l'y trouverez peut-être. Nos enfants, rue des Grès, vont assez bien, cette œuvre vous intéresserait vivement, vous avez beaucoup semé de ce côté, si nous recueillons un peu, nous devrons vous en rendre grâce. La bonne M^me Meslin⁶⁰ ne m'avait rien dit, mais je tiendrai compte de l'avis.