1064  à M. Caille

Les instances faites pour resserrer les liens entre eux ne sont pas des reproches. Charger un frère d'entretenir une correspondance régulière. A propos d'un jeune frère qu'il s'agit de "racheter" du service militaire.

Vaugirard, 7 mars 1866

            Mon bien cher ami et fils en N.S.,

            Je vous remercie de l'empressement que vous avez mis à répondre à ma dernière lettre; j'ai reconnu, à tous les bons et dévoués sentiments qu'elle exprime, votre cordiale affection et votre charité accoutumée. Vous pouvez bien penser, très cher ami, que je ne les ai pas un seul moment mis en doute; après 14 ans de franche et bien fraternelle union, la confiance réciproque est assez établie pour qu'il ne reste plus d'épreuve nouvelle à demander. Je prenais seulement quelque inquiétude, soit pour nos jeunes frères, soit pour le bien de nos œuvres, de la langueur et du ralentissement de nos rapports, toujours moins fréquents à mesure que nous avançons, bien que le besoin d'entente semblât, au contraire, demander qu'ils fussent plus rapprochés et plus réguliers. La bonne disposition que vous montrez de répondre sur ce point à nos désirs nous donne une sincère satisfaction. Il me semble aussi que, si M. Carment continue à prendre quelque part à vos travaux, il pourrait, pour chaque semaine, tenir note de tous les faits ayant quelque peu d'intérêt, en manière de petit journal, et vous nous l'enverriez chaque mois au moins, soit vous-même, soit par l'entremise d'un de vos frères. Rien ne serait plus simple et vous-même, par ce journal, trouveriez le moyen d'établir, pour vos œuvres comme pour la communauté, un coutumier extrêmement utile pour établir des traditions et faire une assise solide à vos travaux charitables. Nous attendrons les rapports et documents dont vous nous annoncez l'envoi.

            J'ai averti M. Laroche que vous étiez disposé à lui envoyer en aide M. Mitouard, dès qu'il serait revenu de la campagne où il était allé passer quelques jours pour essayer de se remettre. Mais vous ne m'avez point dit si M. Mitouard devrait être remplacé chez vous, dans le cas où, la santé de M. Laroche restant languissante, l'aide que vous lui prêteriez devrait durer quelques mois; je vous serai obligé de nous l'écrire.

            Nous avions appris la maladie grave de la mère de M. Carment; nous n'en avons point eu depuis de nouvelles, nous supposons qu'elle va mieux; vous nous direz à ce sujet ce qui en est; nous avons bien prié pour elle.

            Je vous joins ici une petite lettre que vous écrit M. Allard; elle est bien incorrecte, quoiqu'il fasse depuis plus d'un an une petite classe; je l'ai laissée telle quelle, afin que vous suiviez mieux ce qui le concerne. Il a eu un très mauvais numéro au tirage de la conscription, et nous ne lui voyons que des causes peu valables d'exemption, à moins qu'il ne soit bien appuyé; vous verrez quels moyens vous pourriez avoir de le soutenir à l'époque de la révision. La Communauté, obérée par de lourdes charges, est tout à fait hors d'état de faire aucun sacrifice pour son exonération; elle n'a pas eu d'ailleurs à se féliciter des dépenses très notables qu'elle a faites, en temps divers, pour trois sujets appelés par le sort: deux l'ont quittée, un troisième est peu sûr et d'une valeur médiocre. Le jeune Allard est doux, bon garçon, mais peu ferme et mal résolu dans sa vocation; il avait l'idée folle de faire des études, quand il n'a pas même aptitude suffisante pour comprendre les premiers éléments de la grammaire.

            Vous ne m'avez pas parlé depuis longtemps de la direction spirituelle de vos frères; ont-ils quelqu'un qui leur donne à cet égard un peu d'appui?

            Adieu, bien cher ami et fils en N.S., croyez bien à tous nos sentiments les plus affectueux en J. et M.

            Votre ami et Père

                                                                                             Le Prevost

            Nous bénissons Dieu des préparations qui se font pour le patronage de S^t-Jacques; je ne vois pas malheureusement que nous fussions immédiatement en mesure de donner un personnel pour le soutenir, si nous étions appelés à le diriger.